Charles Baudelaire au fauteuil

Félix Tournachon, dit Nadar, vers 1855

Épreuve sur papier salé d’après un négatif sur verre au collodion, 21,2 × 16,4 cm
Paris, Musée d’Orsay, fonds Felix Nadar (collection Marie-Thérèse et André Jammes), acquis avec le concours du fonds du Patrimoine, 1991, PHO 1991 2 1
Photo © Musée d’Orsay, dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt
Nadar réalise ce premier portrait photographique de Baudelaire dans son atelier de la rue Saint-Lazare au début de sa carrière. Le poète pose dans le fauteuil de la mère de Nadar. Les deux hommes se connaissaient déjà depuis plus de dix ans. Baudelaire posera trois fois chez Nadar : en 1855, 1860 et 1862.
 
« Je sens s’élargir dans mon être / Un abîme béant ; cet abîme est mon cœur », constate Hippolyte dans Femmes damnées. Delphine et Hippolyte, l’une des pièces condamnées des Fleurs du Mal. L’œuvre de Baudelaire, critique et poétique, s’entretient tout entière de ce déchirement intérieur de l’être et du malheur d’une impossible identité à soi, qui forme l’essence même de sa mélancolie. C’est dans l’ouverture de cet « abîme » que se développent ensemble l’idée baudelairienne de la beauté, conçue comme une « alchimie de la douleur », et le génie mélancolique de l’artiste, que Baudelaire cultive dans le dandysme comme dans le rire ironique de la caricature, l’un et l’autre frappés d’un même « caractère d’opposition et de révolte ».