Saint Antoine tourmenté pars les démons

Martin Schongauer, vers 1470-1475

Gravure, 31,2 x 23 cm
BnF, département des Estampes et de la Photographie, RESERVE EA-47 (3)-BOITE ECU
© Bibliothèque nationale de France
La reconnaissance publique du talent de Baudelaire ne fut pas immédiate, loin s'en faut. Il faudra surmonter les clichés du réalisme et du charlatanisme (à leur parution, Louis Goudall qualifiait Les Fleurs du Mal de « poésie de charnier et d’abattoir » dans le Figaro), puis ceux du satanisme et de la décadence (suivant la préface de Gautier à l’édition posthume du recueil en 1868, longtemps l’introduction inévitable à l’œuvre), enfin la récupération bourgeoise au titre du classicisme. Anatole France entreprit ainsi de réhabiliter Baudelaire, suivi par Proust, qui plaidait : « A-t-on dit que c’était un décadent ? Rien n’est plus faux. Baudelaire n’est pas même un romantique. Il écrit comme Racine. » Ce sont les pièces les plus harmonieuses du recueil, toutes prises du côté de l’« Idéal » et non du « Spleen » qui furent d’abord consacrées, tandis que Rimbaud dénonçait, dès 1871, leur douce régularité comme une limitation : « La forme si vantée en lui est mesquine : les inventions d’inconnu réclament des formes nouvelles. » Mais l’image du poète changea peu à peu au tournant des siècles.