Enfants
  



Seul, en duo ou en bande, situé sur une échelle d’âge allant du nouveau-né au pré-adolescent, l’enfant dans la bande dessinée offre une palette infinie de caractères.
Sans foi, ni loi, Max et Maurice ont inauguré, en Allemagne, la catégorie des enfants terribles et cruels de la bande. Dans les années vingt en France, de nombreux petits héros voient le jour à leur tour grâce à la presse illustrée enfantine. Moins méchants que leurs aînés, ils partent en tout cas à l’aventure même si ce n’est qu’au bout de la rue.
Sans famille (ou presque), les enfants sont contraints à se débrouiller pour subvenir à leurs besoins. Zig et Puce désirent aller en Amérique pour faire fortune : ils embarquent sur un bateau et celui-ci fait naufrage ; de nombreuses péripéties s’ensuivent. Quant à Quick et Flupke, ils préfèrent réaliser leurs exploits dans un quartier de Bruxelles ; l’univers enfantin reconstitué par Hergé permet aux plus jeunes lecteurs de s’identifier aux héros et aux plus grands de jeter un regard nostalgique sur leur passé. Après guerre, l’Europe se libère du Journal de Mickey et multiplie dans les revues spécialisées françaises et belges les héros adolescents comme Tintin et Spirou. Alors que la BD adulte s’émancipe, la loi de 1949 protège (trop peut-être) les publications pour la jeunesse de certains sujets : violence, politique, etc. Des dessinateurs comme Tito (Tendre Banlieue), essaient de créer des héros plus proches des préoccupations du public et de redonner un souffle plus contemporain à ce support déserté par les jeunes générations. Venus du Japon, les mangas répondront-ils à leurs aspirations ?

Face à l’adulte, l’enfant roi

Bon nombre de bambins de la bande dessinée évoluent dans des histoires où les adultes ont un rôle secondaire. Les enfants héros de ce type de récit en sont les narrateurs : la vie est vue à travers leurs yeux. À leurs côtés, les adultes n’apparaissent pas sous leur meilleur jour, souvent cantonnés à des rôles de représentants de l’autorité : c’est le cas de l’agent de police n° 15 de Quick et Flupke (Hergé) ou des parents de Boule et Bill (Roba), dépassés par leur progéniture. La grande personne définit alors une catégorie à part de personnages. Sans avoir de compte à rendre, l’enfant échappe aux contraintes habituelles de son âge. Malgré sa jeunesse, il surmonte victorieusement les obstacles rencontrés lors de ses incroyables aventures : Pepito (Luciano Bottaro) et Marine (Pierre Tranchand et François Corteggiani) n’hésitent pas à embarquer sur des navires pour faire échouer de méchants pirates. Comme l’explique Dominique Labesse à propos de Quick et Flupke, " leurs exploits sont une tentative originale de création (de reconstitution ?) de ce que peut être un univers enfantin " (Schtroumpf, les cahiers de la bande dessinée, 3e trimestre 1978).
  

Premiers pas
  

1865 : Max et Moritz, deux garnements allemands, accumulent les vilains tours aux dépens de leur entourage (Wilhelm Bush).
1895 : aux États-Unis, gamin des rues aux grandes oreilles avec son éternelle chemise jaune, sans aucune attache familiale, The Yellow Kid semble sorti de nulle part (Richard F. Outcault).
1896 : comme Max et Moritz, les Katzenjammer Kids américains affolent Mama et Der Captain. Ils débarquent en Europe sous le nom de Pim, Pam, Poum (Rudolph Dirks).
1924 : usant de l’argot avec malice, Bibi Fricotin commence sa carrière de titi parisien (Louis Forton).
1925 : Zig et Puce, deux jeunes garçons parfaitement libres, vont jusqu’au Pôle Nord, où ils dénichent un nouveau compagnon, Alfred, le pingouin (Alain Saint-Ogan).
1930 : les deux garnements Quick et Flupke bravent les interdits de l’enfance (Hergé).
1935 : Cuto débute sa carrière de jeune aventurier en Espagne (Jesús Blasco).
1939 : Blondin et Cirage se lancent à l’assaut du nouveau monde (Jijé).
1951 : frère et sœur, Bob et Bobette, accompagné de Monsieur Lambique, rencontrent un fantôme espagnol (Willy Vandersteen).
1955 : Pepito, gentil pirate, combat le vilain Hernandez de la Banane (Bottaro).
1969 : Yakari, le petit Indien, évolue dans un monde de poésie où la nature et l’enfant sont rois (Derib).
1993 : Litteul Kevin, Mad Max en culottes courtes, fait le bonheur des adultes (Coyotte).