La naissance de l'album
Les XIe-XIIe siècles sont à l'évidence l'âge d'or du récit en séquences. Sans pour autant disparaître au XIIIe siècle, il n'atteint plus la complexité des mises en page du siècle précédent. En revanche, l'image se multiplie et les artistes affinent les procédés. Dans la première moitié du XIIIe siècle, un cahier d'images organisé en récit séquentiel, de parfois plus de vingt-cinq folios, débute souvent un manuscrit comme le Psautier de la reine Ingeborge, celui de Blanche de Castille, ou celui de saint Louis dans lequel il aurait appris à lire enfant. Dans la seconde moitié du siècle, le livre tout en bandes dessinées devient un genre, même s'il n'est pas le plus courant. Pour la première fois, les enlumineurs utilisent la séquence comme base même du programme iconographique du livre.

La Bible Maciejowski
Composée en France du Nord vers 1250, cette Bible compte plus de cent quarante pages, toutes illustrées en pleine page à raison de quatre images par page en moyenne, soit cinq cent soixante cases pour raconter l'histoire biblique depuis la création du monde jusqu'à Job et David !
Quelques lignes de texte explicatif (écrites au siècle suivant) encadrent le bloc d'images. Sorties d'images, utilisation de la marge comme lieu de l'action, goût du mouvement instantané, ne dépaysent pas le lecteur du XXe siècle amateur de bandes dessinées.


Les Cantigas de Santa Maria
Vers 1270, en Espagne, est composé un recueil de Cantigas de Santa Maria, collection de miracles de la Vierge racontés en images, chacun en une ou deux pages, à raison de six cases par page. Une ligne de texte est inscrite en dessous de chaque image dans la baguette de séparation des cases. Les pages illustrées se font face et renforcent l'impression d'album de bandes dessinées. Les procédés de l'amorce, de l'horizon continu, de l'arrêt sur image sont employés à chaque page. Le mouvement est parfois saisi sur le vif en scènes à peine séparées par quelques secondes d'intervalle... Le récit séquentiel atteint ici sa perfection.