Abraham Bosse | ||||
Le Mariage à la ville, 1633 : L'Accouchement | ||||
Eau-forte et burin, 260 x 337 | ||||
Tours, MBA, 1992-1-2 | ||||
Le Mariage à la ville se présente en une suite de six planches non numérotées. Bosse y résume divers moments de la vie d'une jeune femme : Le Contrat de mariage, La Mariée reconduite chez elle, L'Accouchement, Le Retour du baptême, La Visite à l'accouchée et La Visite de la nourrice. Elles sont présentées dans le même encadrement. Éditée par Leblond en 1633 puis par Melchior Tavernier, cette suite est, avec Le Mariage à la campagne, la première où Bosse fait vraiment ouvre originale ; il opte pour le format en largeur et choisit des sujets rarement traités auparavant. Dans une chambre chauffée par un grand feu de bois, sous la protection du Christ et de la Vierge dont les images décorent les murs, une femme enveloppée dans un drap et couchée sur un matelas posé sur un lit pliant accouche en présence de son mari, avec l'aide d'amies et de servantes qui lui tiennent les mains. La sage-femme maintient la tête de l'enfant qui naît. Accouchée, sage-femme, mari et dévote tiennent des propos retranscrits par Bosse : la douleur physique et la faiblesse de la pauvre mère, l'annonce d'un garçon et l'exhortation au calme de la sage-femme, la crainte évanouie de l'époux de perdre en un jour femme et enfant, l'appel à l'aide divine de la dévote. En effet, l'homme qui désigne l'enfant est le mari ; on n'appelait un médecin qu'en cas d'accouchement difficile. On retrouve la précision chère à Bosse. Rien ne manque : les chaussures de l'accouchée abandonnées sur le sol, le bassin, le nécessaire de la sage-femme. Pour refléter ainsi la réalité, on peut croire que Bosse eut sous les yeux le traité De la grossesse et accouchement des femmes de Jacques Guillemeau (publié en 1609, réédité et augmenté en 1621, éd. citée), dont quelques passages montrent comme il sait retranscrire l'atmosphère de ces scènes familières à ses contemporains, et dont il avait été lui-même l'acteur à la naissance de ses enfants. Selon Guillemeau, qui n'évoque pas la présence du mari, la sage-femme ne doit être "ny trop jeune ny trop vieille [...], douce, courtoise, endurante, sobre, chaste, non querelleuse, ny cholere, ny arrogante..." (p. 160), et c'est ainsi qu'elle apparaît chez Bosse. Il précise (chap. V, p. 163-164) que lorsque la femme est près d'accoucher, "on préparera un petit lit comme une petite couchette de mediocre grandeur, bien ferme et massue, de moyenne hauteur, tant pour la commodité que pour la sage-femme, et autres qui seront près d'elle, & qui luy assisteront à son travail, lequel sera posé & situé en place commode pour aller & venir autour d'iceluy, loin des portes" (p. 165). Il ajoute (p. 166) : "Outre les deux seruantes & femmes... il y aura deux autres de ses amies ou parentes, ausquelles elle tiendra la main, pour la serrer & comprimer quant les tranchees viendront..." (p. 173). "La sage-femme et tous ceux qui luy assistent la doivent encourager, craignant qu'elle ne mette en danger & son enfant & sa personne, l'admonestant & la priant de retenir son haleine" (p. 174). "Si elle voulait aller à la garderobbe, elle sera exhortée de prendre patience sur l'asseurance que bien tost elle aura un beau fils ou une belle fille, selon qu'elle recognoista desirer l'un ou l'autre" (p. 175), "& comme la teste se présentera pour sortir, la recevra en la prenant doucement entre les deux mains [...]. & faut noter que les tranchees ne cessent point, ou bien peu, lors que la teste & espaules de l'enfant sortent, neantmoins est besoin de donner quelque temps de respirer à la pauvre femme, & la prier de seuertuer le plus qu'elle pourra" (p. 176). | ||||
1er état avec l'adresse de Leblond ; 2e avec celle de Tavernier. En bas à droite : le Blond excud auec Priuilege. Sous la composition, 16 vers sur 4 colonnes : Helas ! je n'en puis plus : ! le mal qui me possede / Affoiblit tous mes sens ; / Mon corps s'en va mourant et n'est point de remede / Aux peines que je sens. / L'ACCOVCHEE // Madame prenez patience, / Sans crier de cette façon ; / C'en-est faict, en ma conscience, / Vous accouchez d'vn beau Garçon. / LA SAGE FEMME // Cette nouuelle me soulage, / Voylà tout mon dueil effacé, / Sus, mon coeur, ayez bon courage, / Vostre mal est tantost passé. / LE MARY. // Dans ce penible effort, à qui n'est comparable / Aucun aultre tourment, / Deliurez-la Seigneur, et soyez secourable / A son enfantement. / LA DEVOTE. | ||||