Abraham Bosse
L'Hôpital de la Charité, v. 1639

Eau-forte. 262 x 325 au coup de planche
BNF Est., Ed 30, rés.*, épr. du 2e état sur 3, avec le nom de Bosse mais sans la mention du privilège

La fondation de l'hôpital de la Charité par Marie de Médicis et Marguerite de Valois avait été confiée aux frères hospitaliers de l'ordre de Saint-Jean-de-Dieu, dits aussi frères de la Charité.
Le Flamand Jean Lintlaër avait été chargé en 1602 de la construction de la pompe de la Samaritaine, sur le Pont-Neuf ; il en avait agrémenté le mécanisme d'un jacquemart qui sonnait les heures ; "nommé concierge et gouverneur de sa machine, Lintlaër fut chargé de son entretien". En 1619, sa veuve, Françoise Robin, obtint la survivance de cet office, pour elle et ses deux fils, jusqu'à sa démission en octobre 1653.
Les lits pour une personne, les hautes fenêtres et le service individuel aux malades sont alors des nouveautés. Il semble que les frères hospitaliers soient assistés dans leurs tâches par de charitables bourgeois bénévoles, et cette planche aurait parfaitement pu s'inscrire dans le cycle des Ouvres de miséricorde. Au fond de cet intéressant exercice de perspective pratique, on aperçoit un autel pour les offices religieux, auxquels les malades pouvaient assister de leur lit.
Herman Weyen, l'éditeur de cette planche, actif à Paris à partir des années 1630 environ, a aussi édité une eau-forte, anonyme, représentant saint Jean de Dieu en prière devant l'enfant Jésus couché sur la croix.
Il existe de l'estampe de Bosse, au musée Carnavalet, à Paris, une copie d'époque à la gouache. La femme du premier plan, à la table, y est vêtue d'une robe semée de fleurs de lis, comme si c'était Anne d'Autriche venue visiter l'hôpital ; l'enfant qui, à gauche, joue avec un moulinet est alors supposé être le jeune Louis XIV, ce qui n'est certainement pas le cas dans l'original.

En haut au centre, sur une poutre : L'INFIRMERIE DE L'HOSPITAL DE LA CHARITÉ DE PARIS ; en bas à droite : ABosse jn. et fe. Dans la marge inférieure, 12 vers sur 4 colonnes : Vous aurez beaucoup merité, / Pour jouyr des choses prosperes ; / Si vous suiuez la CHARJTÉ, / Qu'exercent icy ces bons Peres.// Vous voyez combien ardammant / Leur propre Vertu les oblige / A secourir à tout moment / Ceux que la Maladie afflige // Jls font toute sorte d'efforts, / Dont vn zele saint les enflamme ; / Et pour la guerison des Corps, / Jls pensent au salut de l'Ame // Jmitant leurs soings genereux, / Vous deuez employer vos peines / A seruir les Pauures comme Eux / Dans les jnfirmitez humaines ; au-dessous, dédicace : A Honnorable et Vertueuse Dame, FRANÇOISE ROBIN, veufue de feu IEAN L'INTLAIR, Viuant Jngenieur du Roy en ses Fontaines artificielles. D. D. / Par vostre tres humble seruiteur Herman Weyen.