Abraham Bosse
Les Ouvres de miséricorde : Ensevelir les morts

Eau-forte et burin. 258 x 313 au coup de planche
BNF Est., Ed 30, rés.*, 1er état, avant la suppression du nom de Leblond

Dans une rue d'une ville, un convoi funèbre se dirige vers une église baroque, suivi de quatre hommes en habit de deuil. À droite, une mendiante estropiée avec ses enfants, qui tendent la main pour quêter.
L'origine du thème des Ouvres de miséricorde se situe dans l'évangile de saint Matthieu (XXV, 34-36). Selon Luther et Calvin, rappelle Jean-Claude Boyer après Émile Mâle (L'Art religieux après le concile de Trente, Paris, 1932, p. 86-96), "les bonnes ouvres ne contribuent en aucune manière au salut". L'Église catholique répond que la foi ne saurait sauver sans la charité. En gravant une suite importante de pièces sur le thème des ouvres de miséricorde, qui n'est pas si commun, Abraham Bosse se trouve donc en contradiction avec ses coreligionnaires. Cela amène à se poser de nombreuses questions : sur le protestantisme de Bosse d'abord, peut-être plus hérité que convaincu ; sur le commanditaire, qui peut être l'éditeur, si l'initiative ne vient pas du graveur ; si le graveur ne souhaitait pas se faire bien voir ; s'il n'y a pas une contestation à propos des ouvres au sein même de la communauté huguenote.

Dans la marge inférieure, au centre, le titre : ENSEVELJR LES MORTS. Au-dessous, 16 vers sur 4 colonnes : Si respirant cét Air, qui passe comme vn vent, / Soubs les traits de la Mort l'homme à la fin succombe, / Ne vous estonnés point, quand il n'est plus vivant, / De voir que des Mortels le portent dans la Tombe. // Tous vos pleurs, et vos crys, ne ranimeront pas, / Le vaisseau de ce Corps, plus fragile que verre ; / Jl fut formé de terre, en naissant icy bas, / Et c'est auec raison qu'on le rend à la Terre. // Voulez vous donc que Dieu benisse vos desseins ? / Assistez le Prochain en ce dernier office ; / Et vous adiousterez, comme les plus grands Saincts, / A la Misericorde, vn acte de Justice. // Ainsi pour tous les soings que [sic pour : qu'il] prit d'enseuelir, / Sans craindre aucun danger, les corps priuez de vie ; / Merueilleux fut le fruict, que l'on vid recueillir, / A tous les descendans du bon Vieillard Tobie. Au-dessous, à gauche : ABosse jnu. et fe, et au centre : le Blond excud. auec Priuil. du Roy.