Abraham Bosse
Traité des manières de graver en taille-douce sur l'airain par le moyen des eaux-fortes et des vernis durs et mols. Ensemble de la façon d'en imprimer les planches, et d'en construire la presse. Par A. Bosse de la ville de Tours, graveur en taille-douce, A Paris, chez l'auteur, 1645, in-12, 75 p., planche

BNF Est., Yc 184, rés.*


Ce traité d'Abraham Bosse, qui est le premier manuel technique de gravure complet et détaillé, a connu un succès de librairie relativement important, si l'on en juge par les différentes rééditions, évidemment mises à jour avec les techniques nouvellement découvertes (manière noire, manière de crayon) et les différentes traductions. Parmi les rééditions en français, Schlosser en mentionne une en 1664, il y en a une chez P. Emery, Paris, 1701, où le Traité est "augmenté de la nouvelle manière dont se sert Monsieur Le Clerc" ; une autre, toujours chez Charles-Antoine Jombert, en 1758, augmentée de la gravure en manière noire, de la gravure en manière de crayon et de "celle qui imite le lavis" et de la façon de construire les "presses modernes". La première traduction est due à l'Anglais John Evelyn en 1662 à Londres, date à laquelle paraît aussi une version néerlandaise à Amsterdam ; une traduction allemande, selon Schlosser, paraît à Nuremberg dès 1652, puis en 1745 et 1751 ; une à Dresde en 1765 ; une portugaise en 1801 à Lisbonne.
La publication de Bosse est tout à fait remarquable. Il tient absolument la promesse qu'il fait dans sa préface en déclarant qu'il a l'intention de décrire sa manière de travailler avec "toute la franchise et naïveté" qui lui a été possible. Mis à part quelques détails de langue, un graveur d'aujourd'hui un peu au fait de son métier peut le suivre pas à pas et en tirer profit.
Il est certain que Bosse cherche à imiter à l'eau-forte les effets du burin, dont les qualités essentielles sont la netteté et la précision. Ce n'est pas, dit-il dans son avant-propos, qu'il n'estime "une quantité de pièces déjà faites et qui se font encore tous les jours à l'eau-forte croquée. Mais tous avoueront avec moi, ajoute-t-il, que c'est plutôt l'invention, les beaux contours et les touches de ceux qui les ont faites qui les font estimer que la netteté de la gravure". D'où, quand il cite ceux à qui il a "obligation", des noms d'aquafortistes qui paraissent aujourd'hui incongrus, tels que ceux de Simon Frisius et de Matthieu Mérian, placés avant celui de Jacques Callot ; de même, chez les burinistes, nommera-t-il les Sadeler, Francesco Villamena et Willem van Swanenburgh, avant Marc-Antoine, Cornelis Cort et Augustin Carrache. C'est évidemment en pur technicien qu'il s'exprime, s'adressant à des gens qui ne sont pas seulement des amateurs, mais qui veulent tout connaître des procédés, sans souci du goût, bon ou mauvais.