Atelier d’écriture : à la manière de Zola
Les notes préparatoires ont permis d’approcher le travail de Zola et le mode de filiation entre l’étude d’après nature et la transcription littéraire, et d’illustrer ainsi la spécificité du roman naturaliste.
Pourquoi ne pas récupérer cet acquis et faire de ce modèle un maître d’écriture ? La démarche est simple : en reprenant les catégories principales présentes dans le manuscrit – ébauche et plans, personnages, notes d’enquêtes, notes de lectures –, à chacun, seul ou en groupe, de créer sa réserve d’idées.
 
    Préparation

Ébauche et plans : objectif, synopsis, scénario s’inspirant du schéma narratif (situation initiale, complication, réaction, résolution, situation finale), idées de scènes à faire, fragments de dialogues, relation entre les personnages (modèle actantiel), dynamique de l’histoire, époque, lieux…

Personnages
 : faire une liste, développer l’histoire de chacun. Observer, (se) poser des questions, photographier (également par l’esprit). Analyser en détails les vêtements – parfois révélateurs de l’appartenance à un groupe –, écouter les conversations, noter des expressions –  singulières, familières, voire argotiques – , appréhender avec le recul de l’observateur les idiomes de groupes en en précisant les significations.

Notes d’enquêtes
 : milieux sociaux et décors. Étude à mener sur le terrain après avoir défini les grandes lignes de la recherche. Privilégier pour cette étape l’observation, et choisir en conséquence un milieu accessible. Repérer des détails, les noter afin de les réutiliser pour construire ce que les naturalistes appellent "l’effet de réel". Conjuguer micro-analyse (une cage d’escalier, un étage, un magasin, une vitrine…) et macro-analyse (structure d’un immeuble, d’un centre commercial, d’un quartier, d’une ville…). Les photographies, les plans, les dessins sont les bienvenus. S’inspirer des plans crayonnés par Zola : croquis de situation du quartier, croquis du quartier de la Goutte-d'Or, croquis de la "grande maison".


Notes de lectures
 : romans, essais, documents en relation avec cet univers (CDI…), presse (nationale, régionale, municipale, associative…).
 
  Écriture

Ce travail préparatoire peut être mené individuellement – chaque élève crée une histoire – ou par groupe : cette dernière solution permet de développer les regards croisés, d’échanger les rôles et de stimuler l’imagination par le brassage d’idées. Pour un premier essai, il sera sans doute plus facile de situer l’aventure dans un univers familier. Mais pourquoi ne pas créer des passerelles, surtout au collège, avec les cours d’histoire.
L’écriture peut prendre la forme d’une nouvelle, la consigne doit insister sur la nécessité de réutiliser les informations collectées en rappelant aux écrivains en herbe que le roman ou la nouvelle naturaliste s’appuie sur une observation minutieuse de la réalité et étudie l’influence du milieu et de l’hérédité sur l’individu ; la deuxième exigence peut ne pas être prioritaire ici.
Après avoir été glaneurs d’informations – rien n’interdit de faire le point en classe sur quelques passages obligés pour que la récolte soit riche ou d’aller chercher au CDI des premiers repères –, les élèves deviennent écrivains. L’exploitation d’une telle activité est multiple : au-delà de l’invention littéraire, le sujet se prête à l’écriture de portraits, photos à l’appui ; à la rédaction d’un glossaire, avec une interrogation possible sur la fonction métalinguistique du langage ; à la création d’articles de presse dans la rubrique "société", avec un détour par des journaux : Zola était aussi journaliste.
Cela peut être l’occasion de mieux connaître sa ville ou son quartier et d’organiser en guise de conclusion provisoire une exposition qui peut devenir à son tour un excellent terrain d’observation pour des créations futures.
   
  Exercices de style

L’activité peut s’intéresser à l’écriture de Zola et devenir exercice de style. À partir d’un extrait (l'incipit par exemple), les élèves pourront repérer les caractéristiques stylistiques de l’écrivain : la récurrence du style indirect libre, le rôle de la description, les personnages utilisés pour poser un tableau ou un milieu, les très nombreuses notations spatio-temporelles, la précision du vocabulaire, les champs lexicaux, la présence du langage familier non seulement dans les dialogues mais aussi dans la narration, la construction par plans (de l’extérieur vers l’intérieur, ou l’inverse ; et leur alternance), les contrastes, la ponctuation…
Ces effets d’écriture seraient à rapprocher des consignes que Zola se donne à lui-même. Le scénario du chapitre I est explicite à cet égard : "montrer la misère arrivant", "donner à entendre qu’il prépare une fuite", "montrer Coupeau avant l’arrivée de Lantier", "mettre le tout en scène", "quelque chose de très énergique et de très dramatique" (en évoquant la bataille du lavoir)… Tout l’intérêt est d’étudier quels effets a choisis Zola pour faire saisir ce qu’il ressentait comme indispensable.
Cette réécriture pourrait prendre la forme d’un pastiche donnant une priorité au style ou d’une parodie s’intéressant plutôt aux thèmes récurrents.