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Le confucianisme

Les Entretiens de Confucius
Les Entretiens de Confucius

Bibliothèque nationale de France

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Philosophie humaniste, le confucianisme insère l’homme dans un univers social, régi par des règles morales : celles qui imprègnent la classe des lettrés fonctionnaires.

Confucius (551?-479? av. J.-C.)
Confucius (551?-479? av. J.-C.) |

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La pensée confucéenne se développe au sein de plusieurs « écoles » nées dans les clientèles princières, dans le contexte troublé des Royaumes combattants : le pouvoir central se renforce, les premières institutions monarchiques se constituent, ainsi qu’un corps de fonctionnaires, payés et révocables, tandis que s’élaborent des recettes de sagesse, de longue vie et d’art du gouvernement.
Le confucianisme s’est élaboré à partir de la pensée de Confucius et d’un corpus de sources plus anciennes. Elle repose sur la prise de conscience d’un déclin, par rapport à l’époque mythique des premiers rois de la dynastie des Zhou, représentant un « âge d’or » politique et culturel. Pour retrouver ce temps mythique, le souverain doit se montrer moralement exemplaire, il doit être capable d’attirer à lui les talents et de s’entourer de sages conseillers pour gouverner. Ceux-ci forment la classe des lettrés fonctionnaires, ils doivent être éduqués dans le corpus des « Classiques » qui a pris forme au cours des siècles.

Le lettré fonctionnaire et son univers littéraire

Augmenté parcimonieusement au fil du temps pour aboutir au chiffre de treize Classiques au 12e siècle, les Shisan jing, le corpus est constitué d’un ensemble hétérogène de traditions transmises oralement puis fixées par écrit à des époques très diverses, les plus anciennes au début, les plus tardives à la fin du premier millénaire avant notre ère. Au début de notre ère, elles représentèrent l’héritage des valeurs fondamentales du passé légué par les souverains sages, transmis précieusement par les érudits et les maîtres, Confucius (551-479 avant notre ère ?) intervenant seulement comme un garant de la pureté de la transmission.

Mémoire sur les rites
Mémoire sur les rites |

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Les « Classiques »

Ce qu’il est convenu d’appeler confucianisme mais qui en chinois se dit rujiao, la doctrine des « faibles », celle des lettrés, est un système de pensée qui remonte à la haute antiquité. Confucius lui-même se référait déjà à l’autorité de certains textes du corpus. Les plus anciens sont le Yijing, Livre des mutations, le Shujing, Classique des documents, le Shijing, Classique des odes auxquels s’ajoutent des Chroniques de la période dite des « Printemps et Automnes » dans l’État de Lu, chronique des années 722 à 468 avant notre ère, ainsi que des ouvrages de rituel et un recueil sur la musique non conservé, qui tous ont été composés à l’époque pré-impériale, et sont donc antérieurs à 221 avant notre ère. Sous le règne de Han Wudi (140-88 avant notre ère), le confucianisme fut officiellement reconnu comme une doctrine d’État, et un corpus fixé à cinq textes désormais nommés Jing, Classiques, vit le jour. Un texte de Piété filiale (Xiaojing) et les Entretiens de Kong Zi (le Lunyu), autrement dit les écrits de Confucius, furent ajoutés sous les Han postérieurs (25-220), pour former un ensemble de sept Classiques. À partir des Tang, le corpus s’élargit à neuf textes canons puis passa à douze et enfin à treize : le rituel est représenté par trois ouvrages, les Chroniques des Printemps et Automnes comprennent trois versions commentées, auxquels s’ajoute un lexique ancien, le Erya et, sous les Song, le Canon est augmenté du texte du philosophe Meng Zi, Mencius (vers 370 – vers 290 avant notre ère). Ce corpus compte un nombre de mots relativement peu important, un peu moins de 590 000, nécessitant la connaissance de 6 544 caractères différents dont 1 500 sont des noms propres.

Planches des Sept Classiques
Planches des Sept Classiques |

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Gloses et commentaires

La plupart des textes proscrits par le Premier Empereur réapparurent sous des formes graphiques devenues obsolètes au cours du règne de Jing di (157-141 avant notre ère), au sein d’une société ayant beaucoup évolué. À partir des Han, ces textes difficilement compréhensibles s’entourent de gloses. Des écoles de commentateurs « lettrés au vaste savoir » animent la controverse autour des versions et des traditions divergentes. Les interprétations autorisées se transmettent de génération en génération. La littérature scolastique prend corps, formée d’un vaste ensemble de notes orthodoxes qui enrobent ce corpus et l’alourdit considérablement. On ne saurait sous-estimer la place de l’exégèse dans la littérature traditionnelle : puisque les œuvres du passé expriment un message de perfection qui doit être transmis à la postérité, un individu, et plus encore un empereur, se doit d’en favoriser la transmission ou d’en établir un commentaire qui le rende intelligible aux contemporains. Plutôt que de créer des textes nouveaux, de nombreux érudits s’employèrent à cette noble tâche. Les gloses propres à chaque texte seront officiellement fixées et ne changeront que très peu.

Les Quatre livres

Édition impériale des Six Classiques en écriture sigillaire
Édition impériale des Six Classiques en écriture sigillaire |

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Au 12e siècle, un remodelage opéré par le philosophe néoconfucéen Zhu Xi (1130-1200) regroupe les Classiques dont ceux de Confucius et de Mencius en un seul ouvrage intitulé les Quatre livres, accompagné d’un commentaire qui fera autorité. Jusqu’à la fin de l’Empire, cette anthologie figée devient la quintessence de l’enseignement traditionnel incarnant toutes les valeurs essentielles à son fonctionnement. On parlera alors pour l’ensemble du nouveau regroupement des Quatre livres et des Cinq Classiques, Si shu wu jing. Le dernier remaniement d’une édition de référence sera opéré par Ruan Yuan. La connaissance du corpus, requise à partir des Tang et pendant plus d’un millénaire pour les examens officiels d’entrée dans la fonction publique, a permis à de multiples générations de fonctionnaires voués au service de l’État de partager une même langue écrite unificatrice et des valeurs communes. Les dynasties étrangères mongole des Yuan (1279-1368) et mandchoue des Qing (1644-1911), ne durent leur succès qu’à leur propre insertion dans ce système de valeurs.

Un corpus parallèle

À ce premier ensemble canonique s’ajoutera un second corpus parallèle qui ne sera jamais aussi rigidement codifié mais dont la connaissance s’imposera universellement au sein de la classe lettrée.
En font notamment partie le Chuci, ou Élégies du royaume de Chu, un corpus poétique d’importance considérable, et le Wenxuan, une anthologie littéraire du 6e siècle devenue l’indispensable complément aux Classiques et comportant des sujets moins pesants. On peut encore ajouter le corpus poétique particulièrement brillant sous les Tang, avec un exemple pris parmi les poésies de Bai Juyi.

Édition impériale de l’Éloge de la ville de Moukden
Édition impériale de l’Éloge de la ville de Moukden |

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Provenance

Cet article a été conçu dans le cadre de l’exposition  « Chine, l’Empire du trait » présentée à la Bibliothèque nationale de France en 2004.

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