Encyclopédie des arts du cirque

Arts du cirque

Harvey Leach, le « Nain Américain sur son coursier »

Manège Lalanne, 5 février 1830
Lithographie certifiée par la main par l’imprimeur
Centre national des arts du cirque, Archives Tristan Rémy
© D.R.
Cette estampe représente les prouesses réalisées en 1830 dans la troupe équestre de Lalanne par une petite personne, un jeune adulte affecté d’une infirmité qui a bloqué le développement de ses jambes. Acteur et équilibriste américain, Harvey Leach (1801-1847) est le personnage central d’une pantomime en deux actes et 8 parties « imitée de l’anglais », Le Nain de Sunderwald. Écrite par Thomas James Thackeray et Léopold Chandezon, sur une musique de Sergent, elle est mise en scène par Adolphe Franconi. Harvey Leach y incarne Wamba, le Génie muet du feu, « Nain » du comte de Sunderwald. La pièce est créée le 19 novembre 1829 au Théâtre du Cirque Olympique. Programmée à la suite de celle, fameuse, de L’Éléphant du Roi de Siam, créée en juillet 1829 et reprise en 1861, elle déroge également à la tradition des pantomimes équestres du Cirque Olympique des Franconi.
Ainsi qu’il l’écrit lui-même dans un document autographe présent dans le fonds Auguste Rondel de la Bibliothèque nationale de France, Harvey Leach est né le 27 février 1801 dans l’état de New York aux États-Unis. Engagé à l’âge de neuf ans au théâtre londonien de Drury Lane en 1810, il fait une tournée de plusieurs années en Angleterre, notamment comme acrobate équestre sur la piste du cirque Cooke en 1828, avant de traverser la Manche. Équilibriste, il évolue principalement sur les mains, y compris sur le dos d’un cheval qui tourne autour de la piste. Acteur, rebaptisé Signor Hervio Nano, il se voit attribuer des rôles de personnages inquiétants, magiques, voire diaboliques ou simiesques. Dans The Gnome Fly de George Barnwell, il évoque un esprit matérialisé dans une énorme bouteille bleue qui descend des cintres. La production de 1838, exploitée avec succès pendant une dizaine d’années dans les théâtres mineurs de Londres comme le théâtre Adelphi ou celui de Surrey-Road, alterne avec The Demon Dwarf ou Le conte de Fées. Sa célébrité est telle que lorsque l’acteur proteste publiquement au Théâtre de Birmingham, en octobre 1839, en refusant de se produire avec sa troupe pour avoir été spolié financièrement, le retentissement du procès traverse la Manche, relayé notamment par la presse française.
Au milieu des années 1840, il est exhibé comme une créature sauvage, indéfinissable, dans la ménagerie du dompteur James Carter (vers 1813-1847) qui le fait jouer dans ses pantomimes exotiques. C’est là que l’entrepreneur américain P.T. Barnum le rencontre à Londres en 1844. Il l’intègre à sa galerie de phénomènes, l’affuble d’une fourrure de singe et l’annonce sur de grands placards questionnant avec dérision : « What is It ? ». Il le loue enfin en 1846 à L’Egyptian Hall de Londres où il apparaît dans des séances de spiritisme comme The Wild Man of the Prairies.
Harvey Leach avait promis son corps à la science après son décès, survenu le 7 mai 1847. C’est au Dr Potter, un ami et un confident, qu’il destinait sa dépouille. Un chercheur, spécialiste de l’ère victorienne, Lee Jackson, relève, dans sa biographie de Leach, l’avis nécrologique du Dr Potter, mort d’une plaie infectée, occasionnée pendant l’autopsie de l’artiste. [The Daily News du 25 mai 1847].
 
Sources :
- Le Journal des Débats du 6 octobre 1838.
- William L. Slout, Olympians of the sawdust circle: A Biographical Dictionary of the Nineteenth Century American Circus, Borgo, 2009, p. 169.
- « Harvey Leach, the Gnome Fly or Monkey Man », revue de presse 1838-1847, par Lee Jackson.
- Apparition du sieur Harvey Leach, dans Le Baboon ou Le Nain sauvage, pièce en deux actes, mêlées de couplets, au Théâtre des Arts de Rouen, à six reprises en juillet 1832 et le 5 août 1832 au Théâtre Français, dans Histoire complète et méthodique des Théâtres de Rouen, par Jules-Edouard Bouteiller, 1880, p. 271.