Encyclopédie des arts du cirque

Arts du cirque

Albertiny’s celebrated acrobates in full dress

Illustration d’Armand Biquard, vers 1890
Affiche, lithographie en couleur, 134 x 97 cm
BnF, département des Estampes et de la photographie, ENT DO-1 (BIQUARD, A.)-ROUL
© Bibliothèque nationale de France
L’acrobatie au sol constitue la base de l’acrobatie. Appelée aussi acrobatie au tapis ou acrobatie de tapis, elle dépend totalement de la force musculaire démultipliée par une impulsion naturelle des acrobates. Elle est défendue bec et ongles par les tenants de l’acrobatie pure comme Georges Strehly, contre l’emploi d’artifices comme la pierre d’appui ou la plus petite planche de propulsion. Les quatre Albertini, comme les Trevally, pérennisent en costume de ville ou de soirée une discipline pratiquée en maillot et trousse par les « gymnasiarques » du début du XIXe siècle.
De toute élévation ou pyramide érigée depuis le sol, ou « le parterre », la colonne est la réalisation ultime. Le succès de ce monument d’équilibre, de force et d’agilité repose sur une minutieuse codification des rôles des acrobates. À la base d’une colonne de minimum trois personnes, se campe solidement, jarrets légèrement fléchis, le premier porteur ou porteur acrobatique. Il reçoit sur les épaules le deuxième porteur, qui est également sauteur. Celui-ci se hisse sur les épaules du premier homme en prenant à peine appui sur ses jarrets, ses cuisses, et d’une main, sur sa tête. Une fois debout, il peut accueillir le cascadeur, équilibriste et sauteur, qui grimpe rapidement par le même chemin jusqu’au faîte de la colonne.
La colonne peut se disloquer en tombant d’un seul trait, les trois acrobates parfaitement droits roulant sur eux-mêmes à la dernière minute. Mais elle peut également se rompre en plusieurs morceaux – on dit alors qu’elle est tracassée –, lorsque les deux sauteurs (2e et 3e homme) effectuent ensemble un saut périlleux, avant ou arrière, avant de retomber, soit, pour le cascadeur, sur les épaules du porteur à la place du 2e, soit ensemble au sol.
Au moins deux familles ont présenté un travail en colonne original, quasi inimitable : Les Andreu, acrobates catalans qui faisaient se joindre miraculeusement les sommets de deux colonnes montées en vis-à-vis, en une figure qu’ils ont baptisée Un petit pont, et les Frediani, artistes toscans rendus célèbres à l’aube du XXe siècle pour leur fameuse Colonne à trois érigée en sautant « en rondade » sur le dos d’une solide jument dressée et lancée au galop par le porteur Willy (Guglielmo). Le deuxième homme, porteur et cascadeur, Aristodemo, se reconvertit encore jeune en auguste, l’irrésistible Beby, reconnaissable à sa démarche claudicante sur des jambes plusieurs fois brisées par les chutes de cheval. Il évoque ce travail surhumain dans Les Mémoires d’un clown parues en feuilleton en janvier et février 1930 dans La Liberté.
 
Sources :
- La Liberté du 19 janvier 1930, p. 4.
- G. Strehly, L’Acrobatie et les acrobates, chapitre VIII : « Pyramides et sauts en colonne ».
 
Voir aussi :
- Sauts à l’épaule et colonne brisée des Trevally aux Folies Bergère en 1895.
- « Travail de tapis » par Toulouse-Lautrec.