Frank Pichel
BnF, département des Arts du spectacle, GF-XXXIV(22)
© Bibliothèque nationale de France
Voler de ses propres ailes lorsqu’on a grandi sous la protection et la férule d’une famille de la banque, comme Francisco Juan Arnosi, c’est d’abord se trouver un personnage, d’autant plus essentiel lorsqu’on nourrit le projet de faire rire. Né à Valence vers 1886, petit-fils d’un directeur de cirque en Espagne, fils de Cecilio, chef d’une troupe acrobatique, il se façonne une silhouette d’excentrique, mince et tonique, à la Hanlon-Lees. Perdu dans une redingote trop grande, la chevelure hérissée, Francisco devient Frank et conserve le patronyme adopté par son père, Pichel. Inclassable parmi les clowns, il fait la couverture de l’ouvrage Au Music-Hall, publié par Gustave Fréjaville en 1923.
Frank Pichel est entraîné dès son enfance en Argentine et jusqu’à Saint-Pétersbourg et à Moscou où il passe quelques années au cirque Salamonsky pendant son adolescence. Sa grand-mère est française et lorsqu’en mai 1919 il regagne Paris, dont il connaît déjà les Folies Bergère et l’Eldorado, il s’exprime en sept langues et en joue car l’acrobate comique est aussi ce qu’on appelle un clown parleur. En français il déforme les mots à l’anglaise, comme Billy Hayden ou Foottit : « Miousic », « vous avez viou ? Je souis content ! ». Il parle, dit-il à Maurice Verne dans sa loge de l’Olympia en mai 1929, « avec un accent fait de sept langues car on n’a pas le temps de laisser moisir un accent au détriment de l’autre ». Il émaille ses sketches parlés de « locutions spéciales », de « plaisanteries qui appartiennent à chaque capitale. Ainsi en Russie, pour faire exploser le public, je lançais : « as-tu vu la noix ? »… Trois fois changé mais toujours baptisé du nom du premier, un Italien, Scale, son partenaire est d’abord son porteur. En 1926, Legrand-Chabrier le décrit comme « solide au poste, souffre-taquineries bénévole, costaud que cela amuse discrètement d’être harcelé par un poids plume, cariatide sereine de ce clown qui ne se contente pas envers le ‟porteurˮ de plaisanteries de mots, mais grimpe sur lui, s’en sert de piédestal, et vous savez si Pichel est une statuette trépignante ! ».
Qu’il se produise sur scène, à Paris, Londres – où il se marie –, Vienne ou Barcelone comme sur la piste du Cirque Medrano en 1920, celle du Cirque d’Hiver en 1923 ou au Circo Price de Madrid en 1932, le public attend La lutte contre soi-même. « Dans le tourbillon de cette lutte illusoire, écrit Aline Bourgoin en 1930 dans L’Intransigeant, les coups reçus claquent sur les épaules et sur les jambes nues… Ses bras repoussent l’adversaire invisible… Pichel roule, aux prises avec son ennemi ». Il revendique cet exténuant exercice comme une création mise au point par lui « à la cour impériale de Russie en 1907 » à 10 ans ! Mais selon Tristan Rémy, il l’aurait adaptée de C.W. Ilès, Dario et Tom Toch. À la fin des années 1920, il présente un nouveau sketch, à la Fregoli, dit-il, se transformant rapidement en un être hybride, mi-femme, mi-homme, selon les profils. À l’aise avec les enfants, il inaugure en 1924, en matinée, une attraction en forme de parade, Les Gosses à Pichel, et en 1928, intègre au duo un petit auguste de la quatrième génération, son fils, Harry Pichel.
Sources :
- Gustave Fréjaville (1877-1955), Au-Music-Hall, Paris, Editions du Monde Nouveau, 1923, p. 191 à 193.
- Francisco Javier Rodriguez, Risas y lágrimas: historia de los payasos españoles, Territorio Editorial, 1990, p. 142-143.
- Tristan Rémy, Les Clowns, Paris, Grasset, réedition 2002, note p. 212.
- Programme Cirque Medrano Boum-Boum, 1920.
- Programme du Cirque d’Hiver direction Gaston Desprez, octobre 1923.
- À l’Olympia, chronique de Gustave Fréjaville dans Paris-Midi du 8 octobre 1919, p. 3.
- À l’Olympia, Frank Pichel et Scale dans Le Ménestrel du 23 septembre 1921, p. 7.
- À l’Olympia, avec un nouveau partenaire, dans Comoedia du 10 juillet 1924.
- À l’Olympia, chronique de Legrand-Chabrier dans La Presse du 30 juillet 1926.
- Le trio Frank Pichel à l’Empire dans Le Petit Parisien du 30 décembre 1928.
- « Quatre générations de clowns au travail » par Maurice Verne dans Paris-Soir du 25 mai 1929, p. 1 et 2.
- « Frank Pichel, un comique international » par Aline Bourgoin dans L’Intransigeant du 20 avril 1930.
Frank Pichel est entraîné dès son enfance en Argentine et jusqu’à Saint-Pétersbourg et à Moscou où il passe quelques années au cirque Salamonsky pendant son adolescence. Sa grand-mère est française et lorsqu’en mai 1919 il regagne Paris, dont il connaît déjà les Folies Bergère et l’Eldorado, il s’exprime en sept langues et en joue car l’acrobate comique est aussi ce qu’on appelle un clown parleur. En français il déforme les mots à l’anglaise, comme Billy Hayden ou Foottit : « Miousic », « vous avez viou ? Je souis content ! ». Il parle, dit-il à Maurice Verne dans sa loge de l’Olympia en mai 1929, « avec un accent fait de sept langues car on n’a pas le temps de laisser moisir un accent au détriment de l’autre ». Il émaille ses sketches parlés de « locutions spéciales », de « plaisanteries qui appartiennent à chaque capitale. Ainsi en Russie, pour faire exploser le public, je lançais : « as-tu vu la noix ? »… Trois fois changé mais toujours baptisé du nom du premier, un Italien, Scale, son partenaire est d’abord son porteur. En 1926, Legrand-Chabrier le décrit comme « solide au poste, souffre-taquineries bénévole, costaud que cela amuse discrètement d’être harcelé par un poids plume, cariatide sereine de ce clown qui ne se contente pas envers le ‟porteurˮ de plaisanteries de mots, mais grimpe sur lui, s’en sert de piédestal, et vous savez si Pichel est une statuette trépignante ! ».
Qu’il se produise sur scène, à Paris, Londres – où il se marie –, Vienne ou Barcelone comme sur la piste du Cirque Medrano en 1920, celle du Cirque d’Hiver en 1923 ou au Circo Price de Madrid en 1932, le public attend La lutte contre soi-même. « Dans le tourbillon de cette lutte illusoire, écrit Aline Bourgoin en 1930 dans L’Intransigeant, les coups reçus claquent sur les épaules et sur les jambes nues… Ses bras repoussent l’adversaire invisible… Pichel roule, aux prises avec son ennemi ». Il revendique cet exténuant exercice comme une création mise au point par lui « à la cour impériale de Russie en 1907 » à 10 ans ! Mais selon Tristan Rémy, il l’aurait adaptée de C.W. Ilès, Dario et Tom Toch. À la fin des années 1920, il présente un nouveau sketch, à la Fregoli, dit-il, se transformant rapidement en un être hybride, mi-femme, mi-homme, selon les profils. À l’aise avec les enfants, il inaugure en 1924, en matinée, une attraction en forme de parade, Les Gosses à Pichel, et en 1928, intègre au duo un petit auguste de la quatrième génération, son fils, Harry Pichel.
Sources :
- Gustave Fréjaville (1877-1955), Au-Music-Hall, Paris, Editions du Monde Nouveau, 1923, p. 191 à 193.
- Francisco Javier Rodriguez, Risas y lágrimas: historia de los payasos españoles, Territorio Editorial, 1990, p. 142-143.
- Tristan Rémy, Les Clowns, Paris, Grasset, réedition 2002, note p. 212.
- Programme Cirque Medrano Boum-Boum, 1920.
- Programme du Cirque d’Hiver direction Gaston Desprez, octobre 1923.
- À l’Olympia, chronique de Gustave Fréjaville dans Paris-Midi du 8 octobre 1919, p. 3.
- À l’Olympia, Frank Pichel et Scale dans Le Ménestrel du 23 septembre 1921, p. 7.
- À l’Olympia, avec un nouveau partenaire, dans Comoedia du 10 juillet 1924.
- À l’Olympia, chronique de Legrand-Chabrier dans La Presse du 30 juillet 1926.
- Le trio Frank Pichel à l’Empire dans Le Petit Parisien du 30 décembre 1928.
- « Quatre générations de clowns au travail » par Maurice Verne dans Paris-Soir du 25 mai 1929, p. 1 et 2.
- « Frank Pichel, un comique international » par Aline Bourgoin dans L’Intransigeant du 20 avril 1930.
BnF, Éditions multimédias, 2021