arrêt sur

Le globe céleste

Globe céleste
"Les planètes sont placées au lieu même où elles étaient à la naissance du glorieux monarque afin de conserver à l’éternité une image fixe de cette heureuse disposition sous laquelle la France a reçu le plus grand présent que le ciel ait jamais fait à la terre."
Dédicace du globe céleste, en hommage à Louis XIV.

Le globe céleste représente l’ensemble de l’Univers avec la Terre au milieu tel qu'il était le jour de la naissance de Louis XIV, le 5 septembre 1638. Il présente 1 880 corps célestes figurés par des bossettes de bronze doré et 72 constellations figurées sous des formes symboliques d’animaux ou de personnages mythologiques. Jean-Baptiste Corneille, peintre de ce globe, réalise là une œuvre d’iconographie allégorique dans un sompteux camaïeu de bleu.

Le ciel en mouvement

Le globe céleste de Coronelli appartient au type des "globes convexes" inspiré du système de l'Univers de Ptolémée. Le spectateur se trouve à l'extérieur du globe à une distance infinie et observe sur celui-ci le mouvement des étoiles fixes. Au centre du globe, se trouve la terre, immobile donc au centre de l'Univers, tandis qu'autour d'elle tourne en 24 heures la "sphère des fixes", selon un mouvement qui va de l'orient à l'occident. Outre ce mouvement commun à l'ensemble du Ciel, le Soleil et ses planètes ont un mouvement distinct et opposé, de l'occident à l'orient. Ce parcours décrit l'écliptique, la courbe que suit le soleil dans son déplacement annuel. Sur le globe de Coronelli, l’écliptique est matérialisée par une ligne en cuivre doré sur laquelle coulisse un Soleil. Le soleil est à la dimension où il apparaît vu de la Terre. Son déplacement permet d'observer les astres que le Soleil avoisine dans sa course, le changement des saisons et des signes du Zodiaque (eux-mêmes gravés sur le cercle de l'écliptique). Un double réseau de lignes a été dessiné sur la sphère, un rouge qui est basé sur l'écliptique, un noir, basé sur l'équateur céleste. Dans un cartouche, deux tables, l'une basée sur les calculs de Tycho Brahé, l'autre sur l'Almageste de Riccioli, permettent de calculer les "Époques" de l'Univers, c'est-à-dire le déplacement passé ou futur des étoiles fixes sur une période de 400 ans.
 

Les corps célestes

Sur l'azur du ciel ou sur le bleu marine des constellations évoquant un ciel nocturne, se détachent 1 880 corps célestes matérialisés avec des bossettes de bronze doré en forme de soleil. La grandeur des bossettes varie en fonction de la taille et de la luminosité des corps célestes, classés selon l'ordre copernicien des "grandeurs", des étoiles de la première grandeur, aux plus petites, les nébuleuses, réalisées, elle, avec des petites bossettes rondes. Les comètes peuvent être accompagnées de la date de leur découverte et très rarement du nom de celui qui les a découvertes. Parfois une traîne dorée indique leur direction. En 1781, on inséra dans le globe une "sixième planète", Uranus, que venait de découvrir Herschel et qu'on avait prise jusqu'alors pour une comète.
Les étoiles fixes ont été regroupées en constellations. Elles sont au nombre de 72, les quarante-huit de Ptolémée auxquelles s'ajoutent celles introduites par Mercator et Petrus Plancius entre 1551 et 1613 -obtenues grâce à l'amélioration des lunettes ou à partir d'observations réalisées par des navigateurs depuis les terres australes-, deux constellations "françaises" récentes (le sceptre tenu par la main de justice et la fleur de lis) et enfin la constellation du Rhomboïde créée par Royer.
Traditionnellement, sur les globes célestes, les figures des constellations sont peintes dos à l'observateur comme si elles regardaient la terre au centre du globe et de l'univers. Coronelli, comme Royer, les a fait exécuter face à l'observateur, dans des postures frontales ou semi-frontales, même si le Zodiaque, lui, est représenté comme vu à partir de la Terre. Ainsi, bien qu'il appartienne au modèle des "globes convexes", le globe céleste de Coronelli constitue un ensemble assez hybride.

La description Philippe de La Hire

La Hire, géographe de l’Académie royale des sciences qui a participé à l’installation des globes à Marly, rédige la Description et explication des globes qui sont placés dans les pavillons du château de Marly, traité destiné aux astronomes et à tous ceux qui veulent comprendre cette science.
Il s’attarde tout d’abord sur le réseau de cercles qui se trouve tant sur le globe céleste, pour expliquer la course des astres, que sur le globe terrestre, puisque la Terre est l’une de ces planètes, ou étoiles errantes.
Il explique ensuite comment donner la position des étoiles, en longitude ou en latitude par rapport à l’écliptique ou au méridien qui lui est perpendiculaire, ces cercles étant divisés en 360 degrés, eux-mêmes divisés en 60 minutes.
La Hire s’attarde longuement sur l’origine des dénominations des constellations, issues de la mythologie (Jupiter est figuré sous la forme d’un taureau pour enlever Europe, d’un aigle pour ravir Ganymède). La fable de Callisto a donné le nom de l’Ourse, tandis que le roi d’Éthiopie, Céphée, apparaît avec sa femme Cassiopée, leur fille Andromède…
En définitive, La Hire, qui s’attache surtout à l'intérêt scientifique du globe, ne loue pas la valeur de l’œuvre de Coronelli et finit son exposé par un chapitre sur les progrès qui ont été possibles en astronomie depuis que le Roi a bien voulu établir l’Académie des sciences et créer l’Observatoire grâce auquel "tous les peuples qui s’adonnent à la navigation avouent qu’ils sont redevables au Roy de la certitude de leurs voyages".
 
 

Des textes en français

Innovation importante, le globe céleste de Louis XIV est rédigé en français : le nom des différents cercles ne figure que dans cette langue, même si les constellations sont successivement nommées en latin, en grec et en arabe ; notons que Coronelli s’appuie, pour cette langue, sur les travaux des orientalistes parisiens de l’époque de Louis XIV, et non sur ceux plus anciens de Blaeu.

Un objet esthétique plus que scientifique

Le gardien du globe céleste à Marly, Robert Crosnier, n’a pas eu pour cet objet autant de soin que François Le Large, qui a consacré plusieurs années à la transcription des légendes et à l’explication des figures du globe terrestre. Cette différence tient au caractère avant tout esthétique du globe céleste dans lequel la forme donnée aux constellations et le camaïeu de bleus retiennent aussitôt le regard. En tant qu’objet de science, il ne recueillit visiblement pas les suffrages des scientifiques.
Le superbe décor du globe céleste évoque bien l’infinité des étoiles que Coronelli, dans un cartouche, qualifie de "chose presque incroyable". On y devine la main de grands peintres animaliers auxquels Jean-Baptiste Corneille aurait pu faire appel : on suppose par exemple que Pierre Mignard a pu réaliser le chien de la constellation du "Petit Chien" pour sa ressemblance avec celui qu’il place sur le portrait de Mademoiselle de Tours, un spaniel, le chien alors à la mode à la cour.
 
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