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Rares sont les romans de Jules
Verne qui ne comportent pas une scène maritime. Dans
sa volonté de faire parcourir tous les points du globe
à ses héros, l’auteur leur fait traverser
des mers connues comme la Méditerranée ou la
Mer Noire, des vastes étendues océaniques ou
des mers encore inexplorées comme celles des régions
polaires. |
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Mer
fascinante
Dans l’œuvre de Jules Verne, la mer est fascinante
par la diversité et la beauté de ses paysages.
Nombreux sont les exemples qui pourraient venir illustrer ce
propos : description des immenses étendues de l’Océan
Pacifique (Les Enfants du capitaine Grant, L’Île
à hélice), couchers de soleil sur l’Atlantique
de la côte écossaise (Le Rayon vert), mers
arctiques qui se solidifient lentement sous l’effet du
froid (Voyages et aventures du capitaine Hatteras),
mer enfermée dans les fjords norvégiens (Un
Billet de loterie), océans vus du ciel grâce
à l’Albatros de Robur (Robur-le-Conquérant),
mer souterraine découverte par Lidenbrock (Voyage
au centre de la Terre), mer artificielle créée
en plein désert par des ingénieurs (L’Invasion
de la mer). Toutes ces mers sont peuplées d'une
faune et d'une flore dont la variété des espèces
est toujours soulignée par l'écrivain. 
Mer habitée
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Mobilis in mobile,
mobile dans l’élément mobile : telle
est la devise du Nautilus, le sous-marin du capitaine
Nemo dans Vingt mille lieues sous les mers (1869-1870).
Ce sous-marin permet à Aronnax et à ses compagnons
de découvrir le prodigieux spectacle de la plupart
des mers du globe. Émerveillés, ils rencontrent
de nombreux poissons multicolores et chamarrés, parfois
dangereux comme les requins ou les raies torpilles, des crustacés
plus ou moins agressifs, des baleines et autres cétacés,
des algues, des forêts minéralisées...
Professeur au Muséum de Paris, Aronnax est secondé
par Conseil, un maniaque de la classification, auquel le
marin Ned Land apporte sa connaissance pratique. Ils savent
ainsi repérer de véritables curiosités
marines : algues géantes, coquille senestre ou colossal
dugong rencontré dans la Mer Rouge dont Ned Land recommande
sa chair qui est proche de celle du bœuf.
L’admiration d’Aronnax pour les créatures
croisées lors de ses promenades ou aperçues
à travers le hublot du Nautilus, se transforme
parfois dans le texte en de véritables nomenclatures
d’espèces. Jules Verne n'était pas naturaliste
mais a su s'approprier un vocabulaire et une documentation
scientifiques précises qu'il a insérés
dans le fil de l’intrigue et du récit. Ses longues
énumérations peuvent lasser certains lecteurs,
ou contraire les enchanter comme l'écrivain Michel
Butor montrant les effets stylistiques qui font de l'énumération
des noms de coquillages un véritable poème.
Mers polaires
Alors que le capitaine Nemo cherche à atteindre le pôle
Sud en passant sous la banquise, le capitaine Hatteras dans
les Voyages et aventures du capitaine Hatteras (1864-1865),
essaye de rejoindre le pôle Nord.
Cet explorateur anglais a déjà organisé
deux expéditions dans le même but, mais leur issue
s'est terminée tragiquement avec la perte totale de
l'équipage. Au cours de cette nouvelle tentative, bien
des épreuves l'attendent : le navire est bloqué
dans les glaces, le charbon manque, l’équipage
se révolte et fait sauter le navire. Mais le commandant
Hatteras avec quelques fidèles construit un abris pour
passer l'hiver. Le voyage reprend au printemps grâce
à leur rencontre avec Altamont, rescapé d’une
expédition américaine partie à la recherche
du passage du nord-ouest. L'explorateur Hatteras va découvrir
à l’emplacement du pôle Nord, une mer libre
puis une île volcanique. Étrange vision que celle
de ce volcan en activité et étonnante coïncidence
qui fait que le pôle, lieu abstrait constitué
par le point de convergence des méridiens, est en plein
centre du cratère de ce volcan ! Dans son obstination,
Hatteras voudra même déployer son drapeau au point
précis où est situé le pôle, au
risque de tomber dans la lave en fusion. |
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Mer,
témoin d'un passé grandiose
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Malgré leur diversité,
les mers de Jules Verne présentent la caractéristique
commune de conserver des traces du passé, comme une
archive vivante. Les capacités de résistance
du Nautilus permettent à Nemo de plonger dans
les plus extrêmes profondeurs de l’Atlantique
et de contempler les roches primordiales qui forment la puissante
assise de la Terre. Le scaphandre transforme l’être
humain en nouvel habitant du monde sous-marin lui permettant
de retrouver au fond de l’Atlantique les ruines et
les vestiges de l’Atlantide, antique civilisation détruite
par un cataclysme.
Mais certaines survivances du passé sont plus inquiétantes
: ce sont des créatures monstrueuses qui vivent depuis
des siècles dans les profondeurs inconnues des mers
dont le roman Vingt mille lieues sous les mers en
fournit quelques exemples.

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Mer
aux multiples dangers
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D'autres romans de Jules
Verne évoquent les dangers que courent ceux qui partent
en mer.
Les Enfants du capitaine Grant (1865-1867) en donne
une série d’exemples, depuis le message trouvé
dans une bouteille jetée à la mer par le capitaine
Grant qui a fait naufrage jusqu’aux attaques de pirates
s'emparant d’un navire, en passant par un cyclone dans
l’Océan indien. La mer semble être le
lieu où les plus terribles malheurs peuvent se produire.
Le roman de Jules Verne, Le Chancellor (1874-1875),
fait vivre à ses personnages un nombre impressionnant
de risques auxquels ils devront faire face : incapacité
du capitaine à diriger son bateau, incendie, tempête,
échouage… Les passagers se réfugient
sur un radeau et arriveront in extremis près de la
côte brésilienne, leur état rappelant
celui des personnages du tableau de Géricault, les
Naufragés de la Méduse.
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Certains naufrages ont
parfois des conséquences plus heureuses. Ainsi, dans
L’Épave du Cynthia (1885), un pêcheur
norvégien trouve en mer un enfant dans un berceau
fixé à la bouée d’un navire, le
Cynthia, et l’élève. Erik Hersebom,
devenu adulte, se lance à la recherche de sa famille
perdue lors du naufrage. Il la retrouvera en France après
de nombreuses aventures et épousera la fille de ses
parents d’adoption.
Un autre exemple plus connu, se trouve dans L’Île
mystérieuse (1874-1875). Jules Verne raconte comment
cinq naufragés américains réussissent
à survivre en exploitant les ressources de l’île
Lincoln et en constituant une société parfaite.
À la fin du récit, ils retrouvent le capitaine
Nemo mourant. Le Nautilus sera son tombeau. Le génie
des mers méritait bien un tel mausolée. |
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