Oubli des épreuves, nouveau départ
 

Lorsque ce fut la cinq cent quarante-sixième nuit, elle dit :
On raconte encore, Sire, ô roi bienheureux, que Sindbâd était revenu à Bagdad, la Cité de la paix. Il reprit ainsi son récit.
Je revins dans mon quartier et rentrai chez moi. Je possédais quantité de toutes sortes de biens : diamants, argent, marchandises de valeur et objets divers. Je retrouvai ma famille et mes proches. Je fis des cadeaux, couvris de largesses parents, compagnons et amis, me répandis en dons et aumônes. Je ne me refusai rien : repas fins, boissons de choix, vêtements de qualité. Je multipliai mes fréquentations, agrandis le cercle de mes relations. J'oubliai tout ce que j'avais enduré. L'esprit tranquille, le cœur en paix et heureux, je menai une existence des plus paisibles et me plongeai dans les divertissements et les plaisirs. Tous ceux qui avaient appris la nouvelle de mon retour venaient me demander comment s'était passé mon voyage et s'informer des pays que j'avais traversés. Je leur racontai tout cela, sans oublier les périls encourus. Ils s'émerveillaient et me félicitaient d'avoir échappé à ces terribles dangers. Ainsi se termina mon deuxième voyage. Demain, s'il plaît à Dieu, je vous raconterai le troisième.
 

   
Sindbâd de la mer in Les Mille et une nuits, IV, circa IXe siècle, 546e nuit
(traduction par Jamel Eddine Bencheikh et André Miquel, Gallimard, 2001, « Folio », p.380)