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Les reliures des livres arabes

Des motifs simples et harmonieux
Des motifs simples et harmonieux

Bibliothèque nationale de France

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Où qu’elles soient réalisées, les reliures des livres arabes ont des points communs, en particulier le rabat qui cache la tranche principale. Ce qui n’empêche pas une grande diversité dans les matériaux et les décors.

Qu’elles soient réalisées en Orient ou au Maghreb, les reliures présentent une grande unité dans leur technique de fabrication comme dans leur décor. La reliure à rabat avec ais de carton se généralise à partir du 11e siècle. Trait caractéristique des reliures du monde arabe, mais aussi de Turquie et d'Iran, ce rabat prolonge le plat inférieur pour venir s'insérer sous le plat supérieur.

C'est le cuir que l’on utilise le plus souvent pour la couvrure, mais parfois aussi le textile ou des papiers décorés. Le décor, constitué à partir de constructions géométriques dont les motifs sont parfois associés à des formes végétales, est conçu en harmonie avec celui des pages du manuscrit. La période ottomane verra l'uniformisation des motifs, au profit d'un plus grand usage de la couleur.

Des reliures-boîtes aux reliures à rabat

Les reliures arabes anciennes sont des sortes de boîtes qui habillent des volumes oblongs de parchemin. Constituées d’ais de bois couverts de cuir, elles se caractérisent par une paroi, également de cuir, qui ferme le coffret sur les trois côtés. Une longue lanière s’enroule autour du volume. Réservé aux corans anciens, très différents des autres textes, ce type de reliure disparaît avec les corans en parchemin de format oblong. Par la suite, les reliures les plus courantes présentent un rabat à ais de carton. Les cahiers sont cousus ensemble, une pièce de tissu est collée au dos et fixée aux ais, la tranchefile consolidant le tout. Rangés à plat, les livres sont titrés sur la tranche inférieure.

Techniques et décors des reliures

Le matériau le plus utilisé pour la couvrure est le cuir, de chèvre ou de mouton. Cependant, il existe quelques demi-reliures textiles et de nombreuses demi-reliures de papier. La disposition des motifs sur le champ fait l’objet d’une composition géométrique rigoureuse. Dans un premier temps, les décors sont estampés à froid sur des cuirs bruns. La dorure apparaît au 13e siècle, utilisée en filets, points, rondelles.

Cuir découpé sur un fond de soie verte
Cuir découpé sur un fond de soie verte |

Bibliothèque nationale de France

Couvrure de papier marbré
Couvrure de papier marbré |

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Les plus somptueuses reliures sont réalisées à la demande des souverains mamelouks. Leur champ est couvert d’un entrelacs ou de polygones étoilés, ou d’un motif central le plus souvent en forme de cercle ou bien d’étoile, à six, huit, dix ou douze branches, ou encore de mandorle. Découpés dans le cuir, les décors du motif central et des écoinçons laissent parfois apparaître un fond de tissu coloré. Les doublures des plats et du rabat sont souvent en cuir gaufré ou ornées de motifs semblables à ceux qui décorent les plats.
Au Maghreb plus qu’ailleurs, les larges bordures de tresses ou d’entrelacs semblent appréciées mais le répertoire des motifs reste le même qu’en Orient.

La période ottomane

Dès le 16e siècle, le décor des reliures dans le monde arabe évolue dans un contexte d’échange avec les formes artistiques des mondes turc et persan. Les cuirs utilisés sont de couleurs variées. Les plaques, permettant de réaliser une grande partie du décor en un seul estampage, connaissent une grande faveur. Des pièces de couleur peuvent être collées et estampées sur une partie évidée, donnant un plus grand relief et autorisant la polychromie. La mandorle, motif central devenu favori, contient des arabesques avec fleurs et feuilles, auxquelles peut se superposer un motif de nuages. Le décor des reliures s’harmonise avec celui des pages des manuscrits, où des arabesques à motifs végétaux ornent les frontispices dans une grande variété de couleurs. Pour les livres d’usage courant, le papier marbré et les papiers décorés sont des matériaux de couvrure très appréciés. Le Maroc, qui pourtant n’appartint pas politiquement à l’empire ottoman, développe un art de la reliure aux caractères semblables.

Élégant équilibre de la reliure ottomane
Élégant équilibre de la reliure ottomane |

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Au Sud du Maghreb

Les reliures réalisées dans ces régions jusqu’au 20e siècle sont le plus souvent souples et munies d’un rabat posé au-dessus du plat supérieur, prolongé par une lanière qui peut être enroulée autour du volume, les cahiers n’étant pas cousus ni fixés au dos, ce qui permet également de décorer celui-ci. Ces reliures présentent une grande ressemblance avec celles que l’on fabriquait en Egypte quelques siècles avant et après la conquête musulmane.

Reliure africaine à lanière
Reliure africaine à lanière |

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Reliures persanes

En Perse, l’art de la reliure se cultive avec beaucoup de goût pour la variété. La couvrure la plus estimée est le maroquin et les reliures à recouvrement semblent avoir été les plus fréquentes. Dans les reliures persanes anciennes que nous connaissons, le décor, constitué de fers estampés à froid, est volontiers différent sur les deux plats. Le médaillon central est circulaire, souvent polylobé. À l’avènement des Timurides, à la fin du 14e siècle, l’art de la reliure donne lieu à des réalisations exceptionnelles. Motifs de cuir très finement ajourés, décors animaliers, compositions complexes où l’or est de plus en plus utilisé. Vers 1480 apparaît une technique spécifique qui, née à la cour de Herât, deviendra courante dans l’Iran du 19e siècle, la reliure laquée. Mais les autres types de reliures, estampées et souvent dorées, continuent à exister. Ce seront, surtout au 16e siècle, de grandes plaques rectangulaires au décor très riche qui couvre presque la totalité du plat, ou des reliures dont les plaques centrales, écoinçons et fleurons sont réalisés en mosaïque d’un cuir différent estampé d’un décor, ou encore des motifs de cuir ajouré qui sont collés sur des pièces de soie ou de papier de différentes couleurs.

Reliure persane à plaque
Reliure persane à plaque |

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