Si tous les êtres humains possèdent un ensemble
de droits identiques, il s'ensuit qu'ils sont égaux en droit
: la demande d'égalité découle de l'universalité.
Elle permet d'engager des combats qui se poursuivent de nos jours :
les femmes devraient être égales aux hommes devant la loi
; l'esclavage, aboli – l'aliénation de la liberté
d'un être humain ne pouvant jamais être légitime
; les pauvres, les sans-grade, les marginaux, reconnus dans leur dignité
; et les enfants, perçus en tant qu'individus.
Cette affirmation de l'universalité humaine provoque
l'intérêt pour des sociétés autres que celle
où l'on est né. Les voyageurs et les savants ne peuvent
cesser du jour au lendemain de juger les peuples lointains avec des
critères provenant de leur propre culture ; pourtant, leur curiosité
est éveillée, ils deviennent conscients de la multiplicité
de formes que peut prendre la civilisation et commencent à accumuler
des informations et des analyses, qui avec le temps transformeront leur
idée de l'humanité. De même pour la pluralité
dans le temps : le passé cesse d'être l'incarnation d'un
idéal éternel ou un simple répertoire d'exemples,
pour devenir une succession d'époques historiques dont chacune
a sa propre cohérence et ses propres valeurs. La connaissance
de sociétés différentes de celle de l'observateur
lui permet en même temps de tourner vers soi un regard moins naïf
: il ne confond plus sa tradition avec l'ordre naturel du monde. C'est
ainsi que le Français Montesquieu peut critiquer les Persans,
mais aussi imaginer des Persans qui critiquent judicieusement les Français.