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Des
maos à Libération
En mars 1970 les directeurs de La Cause du peuple, Jean-Pierre
Le Dantec et Michel Le Bris sont successivement arrêtés
sous l'inculpation de crime contre la sûreté de
l'État et le journal, qui prône la violence anti-policière
et anti-patronale, est régulièrement saisi. Des
militants maoïstes viennent alors demander à Sartre
d'assurer la direction juridique de leur journal pour en permettre
la survie. Sartre accepte et entame une nouvelle période
d'action aux cotés des militants de la Gauche prolétarienne
: il ira vendre La Cause du peuple dans la rue, prendra
la parole devant les usines Renault à Boulogne-Billancourt
; il pénétrera dans les ateliers de l'île
Seguin dont il sera expulsé manu militari et sera
embarqué par la police pour avoir ouvertement vendu le
journal interdit, sans toutefois être inculpé.
Plus tard, il prendra également la direction de journaux
révolutionnaires comme Tout ! et Révolution
! Cependant, en mars 1972, même s'il approuve officiellement
l'enlèvement et la séquestration pendant quarante-huit
heures d'un agent de la Régie Renault par le groupe maoïste
clandestin la Nouvelle résistance populaire, Sartre commence
à prendre ses distances avec l'ouvriérisme sommaire
et la violence de La Cause du peuple. En mai de la même
année, il critique les propos extrêmement violents
rapportés par le journal à l'encontre du notaire
accusé du crime de Bruay-en-Artois. |
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Conscient des outrances et
des insuffisances de la presse révolutionnaire, Sartre
prend ses distances sans abandonner pour autant l'idée
d'une presse populaire qui donnerait la parole à tous
les exploités et développerait un authentique
journalisme de terrain. C'est pourquoi, durant l'hiver 1972-1973,
Sartre, avec entre autres Serge
July et Benny Lévy, s'occupe activement du projet
de lancement du quotidien Libération, dont il
accepte de prendre la direction. Il abandonne même provisoirement
la rédaction du tome IV de L'Idiot
de la famille, auquel il travaille, montrant ainsi toute
l'importance qu'il accorde à la fondation du quotidien.
Le premier numéro paraît le 22 mai 1973 , marquant
l'aboutissement d'un des derniers grands combats de Sartre.
Un an plus tard, évoquant des raisons de santé,
il abandonnera toutes ses responsabilités dans la presse.
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L'idiot
de la famille
Entre 1954 et 1956, Sartre rédige une quinzaine de blocs-notes
sur Flaubert, pour répondre, en se confrontant à
la psychanalyse, à cette question : "Que peut-on savoir
d'un homme aujourd'hui ?". Le titre L'Idiot de la famille
est trouvé en 1957. Une version nouvelle, vers 1964-1965,
est élaborée dont quelques fragments paraîtront
en 1966, sous les titres La conscience de classe chez Flaubert
et Flaubert, du poète à l'artiste. Entièrement
remaniée en 1969, l'œuvre est publiée en 1971
en deux épais volumes.
Écrit à la suite, le tome III, étude sociocritique
consacrée aux écrivains du Second Empire que réunit
la passion de "l'échec", parut en 1972. L'entreprise
devait être complétée par un volume autour
de Madame Bovary interrompu par la cécité
de l'auteur, mais dont il reste des notes.
L'Idiot de la famille est à la fois une biographie
de "psychanalyse existentielle" et un traité de
philosophie sur "l'universel-singulier" où s'approfondissent
les thèmes de l'imaginaire, du conditionnement individuel,
la question du Sujet et son décentrement par les jeux
de rôle, les fictions et la matérialité
du langage. Cet ouvrage inachevé est pourtant le plus
abouti de Sartre, tant sur le plan théorique il
y étudie la bêtise, le sado-masochisme, l'hystérie,
la déréalisation , que pour la compréhension
de Flaubert et de ses mythes personnels la Terre est
le Royaume de Satan, le Pire est toujours sûr ,
amenant, via les écrits de jeunesse, à l'explicitation
de l'œuvre littéraire et du style.
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