Jean-Paul Sartre (1905-1980)
L'Idiot de la famille, première partie : "La constitution"

Entre 1955 et 1970. Manuscrits autographes et dactylographies. 1 415 f., 27 x 21 cm
BNF, Manuscrits, fonds Sartre

"Mon étude a connu trois ou quatre versions avant celle qui paraît aujourd'hui et qui a été réécrite de fond en comble en 1968-1970", explique Sartre en 1971, au moment de la publication des deux premiers tomes (Situations X, p. 93). Le manuscrit de la première partie, "La constitution" - 1 415 feuillets -, est constitué de plusieurs ensembles, extraits probablement de ces versions antérieures, comme en témoignent encres, plumes et papiers, auxquels s'ajoutent des fragments d'anciennes dactylographies. C'est probablement au moment de la reprise de 1968 que la subdivision a été établie, certains titres reportés après coup et des feuillets écrits ou réécrits. Il est aisé de reconnaître dans certains feuillets très travaillés, qui ne remplissent pas la page, l'écriture des Mots et, en revanche, celle de la Critique de la raison dialectique dans d'autres sans rature, où la plume court de la première à la dernière ligne. "Le livre a été écrit au fil de la plume : la forme la plus simple et la plus courante est la meilleure ; si quelquefois le style apparaît, c'est parce qu'on ne peut pas dire autrement qu'en style certaines choses du type "indisable" ou difficiles à dire. Le sens du style dans Les Mots, c'est que le livre est un adieu à la littérature : un objet qui se conteste soi-même doit être écrit le mieux possible. Si le Flaubert ressemble aux Mots par endroits, c'est parce qu'après cinquante ans d'écriture, on finit par être imbu de son propre style et que certaines formules viennent spontanément, sans aucun travail." (Situations X, p. 93-94.) À la différence des Mots, dont les manuscrits ont été épurés jusqu'à la version finale, ceux des trois parties de L'Idiot de la famille sont restés dans leur intégralité, puisque les manuscrits des tomes II et III, également volumineux, présentent eux aussi des traces de strates d'écriture plus ancienne et déjà foliotée. Par donation, dation, acquisition la version définitive de cette somme vertigineuse est conservée dans sa presque totalité au département des Manuscrits, mais comme pour d'autres grands textes de Sartre, des feuillets de brouillons ont été dispersés par centaines.