L'ordre de  la  Cité,
le bon gouvernement     


Les fondateurs du genre utopique, Thomas More au XVIe siècle, Bacon ou Campanella au XVIIe, se réclameront tous de l'héritage de l'Antiquité, et d'abord des grands auteurs qui ont inauguré la réflexion politique sur la cité idéale.
Au premier rang de ces "autorités", Platon et Aristote, dont les oeuvres sur la cité juste sont tenues pour fondatrices, puis Saint Augustin et les théologiens du pouvoir spirituel, enfin, à la fin du Moyen Âge, les auteurs des Miroirs des Princes, conseillers de la puissance royale.
La "bonne cité", dans cette traditio antico-médiévale, est celle qui s'organise à l'image du cosmos, reconduisant un ordre hiérarchique inspiré de la volonté divine et inscrit dans le plan de la nature. Cet ordre, où chacun a sa place, garantit la concorde et fonde l'unité de la cité.
Cette aspiration à l'unité du corps social, qui sera un trait essentiel de la pensée utopique, on la retrouve magnifiée, jusqu'à la fusion, dans l'idée de la communauté monastique, elle-même modèle de multiples communautés, religieuses ou laïques.
  

  
Platon

Mais quoi ? Ne verra-t-on pas disparaître les procès et les accusations réciproques, dans notre cité où chacun des gardiens n’aura à soi que son propre corps, et où tout le reste sera commun ? Ne s’ensuit-il pas que nos citoyens seront alors à l’abri de tous les conflits que fait naître parmi les hommes la possession de richesses, d’enfants et de parents ? […] Ainsi ils seront délivrés de toutes ces misères, et mèneront une vie plus heureuse que la vie bienheureuse des vainqueurs olympiques.
La République, livre V
  


Saint Augustin
Deux amours ont donc fait deux cités : l’amour de soi jusqu’au mépris de Dieu, la cité terrestre ; l’amour de Dieu jusqu’au mépris de soi, la Cité céleste.
La Cité de Dieu,   413-427.