Les utopies sociales
de l’âge romantique

Loin de constituer l’adolescence d’une pensée qui verrait sa pleine maturité dans le socialisme ultérieur, les utopies sociales de l’âge romantique ont plusieurs caractéristiques communes qu’elles puisent dans leur enracinement historique : nées au début de l’ère industrielle, après les bouleversements du temps des révolutions, elles représentent autant de tentatives de reconstruire l’univers moral et social sur les seules bases de la science positive, d’où elles déduisent l’idée d’une évolution naturelle menant au bonheur pour tous.
     

Saint-Simon (1760-1825) et ses successeurs prônent l’instauration d’un nouveau pouvoir spirituel confié aux savants. Owen (1771-1858) fonde lui aussi ses espoirs sur le développement industriel. Fourier (1772-1837) entend se servir des passions humaines, non pas contradictoires, mais complémentaires, pour faire naître l’harmonie. Cabet (1788-1856) et ses disciples partent pour l’Amérique construire l’Icarie égalitaire.

De l’un et l’autre côté de l’Atlantique, avec des moyens souvent précaires qui font d’eux des aventuriers, les utopistes renoncent peu à peu à leur rêve d’une société mondiale organisée rationnellement, pour se limiter à l’établissement de communautés restreintes comme celle de Guise en France et d’Oneida en Amérique.

  

 
Comte de Saint-Simon

L’Âge d’or du genre humain n’est point derrière nous ; il est au-devant, il est dans la perfection de l’ordre social.   
De la réorganisation de la société européenne, 1814.
  


Charles Fourier
  
Le bonheur, sur lequel on a tant raisonné ou plutôt tant déraisonné, consiste à avoir beaucoup de passions et beaucoup de moyens de les satisfaire.   
Théorie des quatre mouvements, 1808.