Dossier préparatoire du Ventre de Paris, fiche de Lisa
Émile Zola.
Manuscrit autographe, 205 x 155 mm
BnF, Manuscrits, NAF 10338, f. 49
© Bibliothèque nationale de France
On ne me reprochera plus mes femmes hystériques, et j'aurai fait une honnête femme : une femme chaste, économe, aimant son mari et ses enfants ; tout à son foyer, et qui sera socialement et moralement un mauvais ange flétrissant et dissolvant tout ce qu'il touchera [...]. Je la place dans sa charcuterie, au milieu de ses viandes avec un tablier blanc. Et c'est là que je place avec elle les lâchetés de la chair, les ramollissements de l'esprit, la détente de la volonté, la chute à la digestion épaisse et satisfaite." Le Ventre de Paris devait être pour Zola le pendant de La Curée et Lisa devait répondre à Renée. Dans ce troisième roman de la série, après La Fortune des Rougon, le "roman des origines", et La Curée, Zola veut montrer comment chaque classe est tenue et pourrie par ses appétits : de pouvoir et de luxe pour la haute société, d'aisance et de bonne chair dans la petite bourgeoisie. En fait, en parcourant le portrait de Lisa, cette "honnête femme", qui pour être chaste n'en est pas moins corruptrice, on s'aperçoit que Zola a dépeint, sans le savoir encore, l'exact contrepoint de Nana : à la pourriture par le sexe correspond la pourriture par l'estomac ; au bas-ventre répond le ventre. Seulement le chancre qui ronge la petite bourgeoisie vient d'elle-même et lui ressemble : Lisa, idole grasse et lisse de la charcuterie, convenable, stupide, égoïste, est finalement plus terrifiante, dans son apparente normalité, que Nana, la "bonne fille" sortie du ruisseau. Comme Nana, Lisa, trônant derrière sa caisse et reflétée à l'infini par les glaces de son magasin, a inspiré Manet (Le Bar des Folies-Bergère)."
 
 

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