L'immeuble parisien
Un microcosme social

   

"La cuisine de tous les jours terriblement louche."

Émile Zola, Pot-Bouille
 
  Dans le projet d'enquête, préalable à la démarche romanesque de Zola, l'habitat occupe une place privilégiée comme révélateur des différents "mondes". Au "logis des pauvres" de L'Assommoir répond l'immeuble bourgeois de Pot-Bouille, l'hôtel particulier des riches spéculateurs de la plaine Monceau (La Curée) ou la maison bourgeoise avec jardin à Passy (Une page d'amour), la mansarde pour l'étudiant désargenté ou l'ouvrier aux abois (Le Ventre de Paris).
Maison bourgeoise de quatre étages nouvellement bâtie sur la rue de Choiseul, l'immeuble de Pot-Bouille, érigé avant les grands travaux haussmanniens, est le pendant de la maison ouvrière de L'Assommoir. Le romancier révèle ce qui se passe derrière "les belles portes d'acajou luisant", la "pot-bouille" de la petite bourgeoisie, "la cuisine de tous les jours terriblement louche et menteuse sous son apparente bonhomie". Zola passe au vitriol les tares et défauts de la petite bourgeoisie, à travers quelques personnages, archétypes de leur classe, comme l'architecte Campardon ou le conseiller Duveyrier. Mais le fossé est désormais davantage horizontal que vertical : il se creuse entre la belle façade sur rue de la bonne société dont les appartements, uniformisés, se ressemblent tous et celle de l'arrière-cour, "puits étroit" où se déversent toutes les rancœurs de la domesticité. Les classes populaires ont en effet déserté les "beaux quartiers" de l'Ouest parisien (Opéra, plaine Monceau) pour les "faubourgs" (la Goutte-d'Or) ou la banlieue (plaine Saint-Denis), avec leurs constructions massives et de mauvaise qualité.


Les documents :

Albert Robida, La Maison de Pot-Bouille
Jean Béraud, La soirée
Georges Bellenger, Pot-Bouille, "La cour des cuisines vue de haut en bas"
Magasin Au coin de rue