Le Livre des échecs amoureux
Evrart de Conty.
(diagramme réalisé avec DiagTransfer)
Les pièces d’échecs ont été préalablement présentées, ce qui permet de savoir que tel personnage est un pion, tel autre une Tour, etc. Sur les cases d6 et d3 figurent deux personnages, visibles sur le manuscrit, pour signifier que chacune des Dames est issue de la promotion du pion qui l’accompagne. Alors qu’il était penché au-dessus de la fontaine pour admirer le bouton de rose, le héros du roman de Guillaume de Lorris fut criblé de flèches, tirées par le dieu d’Amour. Sur l’échiquier, ces flèches ont été disposées autour de Doux Regard (Tc7), lequel, dans le roman, est chargé de porter l’arc et les flèches, lesquelles se nomment : Beauté (b6), Simplicité (c6), Franchise (c8) et Doux Semblant (d6). Lorsque l’amant se penche au-dessus de l’échiquier-fontaine pour réfléchir, la jeune fille décoche alors ses traits.
Le premier est BL-BM, dit le manuscrit, c’est-à-dire b6-b5. L’amant répond en avançant le pion Regard, soit b3-b4. Le pion Beauté touche le pion b4. Comme dans le Roman de la rose, la première flèche atteint l’œil de l’amant – le pion Regard (b4). Ensuite, la jeune fille joue c6-c5. Elle avance le pion Simplicité, décochant ainsi la deuxième flèche du roman de Guillaume de Lorris, laquelle atteint l’œil de l’amant. Ce dernier réplique par c3-c4. Et la partie se poursuit sur le miroir de l’échiquier comme le Roman de la rose s’est poursuivi sur le miroir de la fontaine. L’amant jouera de manière docile face à une jeune fille dominatrice, Évrart de Conty illustrant ainsi un aspect important de l’érotique courtoise, la soumission de l’amant à sa dame. Dans la poésie courtoise, lorsque la dame gagnait aux échecs contre son amant, cela signifiait qu’elle lui accordait ses charmes. Ici, la jeune fille fera mat une trentaine de coups plus tard avec le pion Doux Semblant, la cinquième et dernière flèche du Roman de la rose.