|
|
|
|
 |




|
 |
Le héros de bande dessinée,
même sil cultive une solitude en accord comparses, faire-valoir ou fidèles
compagnons. Que serait Pam sans Poum, Zig sans Puce, Quick sans Flupke, Blake sans
Mortimer, Tintin sans Milou, Lucky Luke sans Jolly Jumper, Boule sans Bill, Gil Jourdan
sans Libellule, etc. ?
On trouve deux types de comparses : tout dabord, les compagnons de route du héros
pur et dur, fidèles amis ou redoutables ennemis (Obélix, Milou, Haddock, Rastapopoulos,
Olrik, Jolly Jumper, les Dalton, Enak, etc.), qui constituent une galerie de personnages
truculents et hauts en couleur capables parfois même de voler la vedette au héros.
Ils sont à distinguer du " second " héros, alter ego du premier, qui
donne au caractère univoque du héros une personnalité duelle : cest le cas de Zig
et de Puce, de Blake et de Mortimer ou encore de Tanguy et de Laverdure. Indissociables et
complémentaires, ils ne se conçoivent pas lun sans lautre. Leur
individualité se perd au sein du tandem. Ne seraient-ils pas alors lun et
lautre les faces dun même personnage derrière lequel sen
dissimulerait un troisième : le narrateur, qui peut lui-même en cacher deux (le
scénariste et le dessinateur) ! Héros et comparses entretiennent en effet un lien
passionnel avec leur(s) créateur(s). Pourquoi choisir deux héros, quand un seul aurait
suffi, en quoi cette dualité répond-elle à la projection fantasmatique de
lauteur ? Où est Jekyll, où est Hyde ? Chez Jacobs, le couple de
personnages correspond à deux facettes dun même héros idéal : la science et
la justice, lintelligence et la force, la spontanéité et la mesure, la fantaisie
et la rigueur, au service dune même cause, le Bien.
|
|


 |
|
Le lien du héros unique et de
ses comparses avec le créateur est du même ordre ; Tintin est lincarnation de
lidéal dHergé, vertueux, chevaleresque, ingénieux, parfait en somme mais
aux dires de lauteur, " justement, trop parfait " et même
" pas tout à fait humain ". Les " seconds
rôles " comme Haddock et Milou, bons vivants incarnant des défauts bien
humains, pourraient être les " docteurs Jekyll " dHergé. Ils
donnent un peu de piment à la transparence du héros, qui nexiste guère en dehors
de la lutte manichéenne quil mène contre les méchants ; sorti de
laventure, il est inconsistant et voué au néant. Les comparses donnent ainsi
corps au récit et à laction : maillons solidaires dune même chaîne,
ils se rendent indispensables au héros et on ne les imagine pas les uns sans les autres.
Cest le cas dAstérix, toujours accompagné du fidèle Obélix, lui-même
inséparable de son petit chien, Idéfix. Le héros se trouve décomposé en trois
personnages complémentaires qui séquilibrent les uns les autres et donnent toute
leur saveur à laction.
|
|


 |
|
On peut ainsi établir des
groupements de personnages (en général, un héros, un second, une mascotte, des
alliés puissants et un ennemi redoutable), par exemple : Tintin / Haddock / Milou /
Rastapopoulos ; Atérix / Obélix / Idéfix / Panoramix / César ; ou encore
Spirou / Fantasio / Marsupilami / Champignac / Zorglub / Spip.
Les seconds rôles ont donc non seulement pour fonction dégayer la personnalité du
héros, de lui donner une épaisseur humaine et déviter le manichéisme à tout
crin mais aussi de dynamiser et de faire rebondir laction. Lécole
franco-belge a produit une grande diversité de caractères, croquant avec originalité et
humour bien des types humains.
|
|
|
|

Honneur aux seconds rôles dans Tintin
|
|


 |
|
La diversité
des caractères des comparses de Tintin est un bon exemple des ressources que constituent
les seconds rôles dans la peinture de la comédie humaine.
La faiblesse et la fidélité : Milou. Cest un chien, donc le plus fidèle ami
de lhomme. Et sil ne parle pas, il communique aisément avec son maître, par
une complicité silencieuse, qui sapparente à une sorte de télépathie secrète.
Véritable alter ego de Tintin, il incarne tous les défauts qui échappent
(manquent ?) à son maître : vantard, paresseux, gaffeur, malchanceux et
gourmand, il se laisse aisément tenter par le whisky, à linstar dHaddock.
Régulièrement, un petit démon et un ange gardien qui lui ressemblent comme deux gouttes
deau le prennent en défaut mais il na de cesse de rendre service et de faire
preuve de gentillesse.
La colère et la spontanéité : Haddock. Célèbre pour ses impayables jurons, il
incarne le bon vivant, impulsif, généreux, jovial et vindicatif. Il aime plus le whisky
que laventure. Gaffeur et maladroit, il accumule les bévues et assure le comique de
la série.
Le savant distrait et rêveur : Tournesol. Rêveur génial, paisible, modeste et
courtois ; sa surdité légendaire le confine dans un monde tourné, comme son
inséparable pendule, résolument à lOuest, vers lhorizon du Bien.
La stupidité et la gaffe : Dupont et Dupond. Nullement parents malgré leur
apparente gémellité, ils incarnent la bêtise mais aussi lintolérance, la
maladresse et la prétention de lesprit petit-bourgeois.
Le vice et la vulgarité : Rastapopoulos. Le méchant, réunissant au-delà du
banditisme les pires travers : le mauvais gôut, la médiocrité, la lâcheté,
lhypocrisie. Il est entouré lui-même de comparses en tous genres, plus minables et
redoutables les uns que les autres.
Le sans-gêne et la veulerie : Séraphin Lampion. Avec son indescriptible
progéniture, il incarne selon Hergé le " Belge moyen " dans toute
son horreur.
Lenfant gâté, insupportable et capricieux : Abdallah. Il rend la vie dure à
nos héros par des blagues toutes plus terribles les unes que les autres.
|