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L'effet
de " zoom " ou de gros plan
Les artistes nont pas attendu que la photographie leur
offre le " zoom ". Le principe du grossissement était déjà connu au
XIIIe siècle, depuis linvention des lunettes de vue et des lentilles
dont les enlumineurs se servaient pour peindre, dans les
" miniatures ", de minuscules objets. Et si le
" héros " dune scène savérait trop petit pour être
bien discerné à lil nu, il était grossi abusivement quand le reste de
l'image conservait des proportions normales. Dans un Canon d'Avicenne, daté de la
première moitié du XIIIe siècle, les oreilles d'un sourd sont dessinées à
une échelle différente de celle du reste de sa tête, plus grandes afin de bien
comprendre de quoi il souffre. Une bague peut devenir grosse comme un collier et bien plus
grande que la main ; une serrure et sa clé sont aussi grosses que la tête du
" présentateur " dans l'image.
Leffet de zoom est aussi employé de manière symbolique ou pratique.
Symbolique : la tête de Judas est démesurément agrandie à côté de l'arbre
réduit auquel elle est pendue, dans un tableau de l'atelier de Neri di Bicci, première
moitié du XVe siècle. Pratique : dans une miniature du XIVe
siècle, un livre à ladresse des amoureux et des troubadours est ouvert et agrandi
aux dimensions d'un drap de lit pour que le texte soit lisible. Ce principe du gros plan
dun texte, sous la forme d'un rollet ou d'un acte notarié agrandi et lisible à
l'intérieur même d'une image, est fréquent aux XIVe et XVe
siècles. Le procédé ne diffère du zoom cinématographique que par la coexistence de
deux échelles de grandeur à l'intérieur d'un même espace graphique. Nagrandir
dans une même image que le seul objet ou personnage important était lunique choix
possible pour évoquer l'impression de gros plan aux yeux du lecteur médiéval, les
artistes nayant pas inventé le procédé de " linsert ".
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