Illustration pour Estelle et Némorin de Florian | ||||
Paris, librairie économique, an IX. |
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BNF, Littérature et art, Z. 29119 | ||||
"C'était la villa de Mme Gautier, qui l'habitait pendant la belle saison avec ses deux nièces, dont la plus jeune s'appelait Estelle. Ce nom seul eût suffi pour attirer mon attention ; il m'était cher déjà à cause de la pastorale de Florian (Estelle et Némorin) dérobée par moi dans la bibliothèque de mon père et lue en cachette, cent et cent fois. Mais celle qui le portait avait dix-huit ans, une taille élégante et élevée, de grands yeux armés en guerre, bien que toujours souriants, une chevelure digne d'orner le casque d'Achille, des pieds, je ne dirai pas d'Andalouse, mais de Parisienne pur sang, et des... brodequins roses !... Je n'en avais jamais vu... Vous riez !!... Eh bien, j'ai oublié la couleur de ses cheveux (que je crois pourtant noirs) et je ne puis penser à elle sans voir scintiller, en même temps que les grands yeux, les petits brodequins roses. En l'apercevant, je sentis une secousse électrique ; je l'aimai, c'est tout dire [...]. Non, le temps n'y peut rien... d'autres amours n'effacent point la trace du premier... J'avais treize ans, quand je cessai de la voir... J'en avais trente quand, revenant d 'Italie par les Alpes, mes yeux se voilèrent en apercevant de loin le Saint-Eynard, et la petite maison blanche et la vieille tour... Je l'aimais encore..." (Mémoires, chap. III)
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