Saturation
de l'espace graphique, accumulation des ratures et des additions marginales,
stratifications des corrections interlinéaires, dispersion des
signes de renvoi et dislocation des séquences d'écriture,
chaos de la mise en page autographe, traitement presque pictural des tracés
qui s'étoilent sur le papier et des taches d'encre qui oblitèrent
violemment les suppressions... : le feuillet 429 de La Légende
de saint Julien l'Hospitalier de Flaubert donne une image explicite
des intensités qui se jouent sur une même page de brouillon.
Ici, Flaubert avait à traiter un moment clé du récit :
le carnage de centaines d'animaux et la prophétie d'un grand cerf
qui va annoncer au jeune héros qu'en punition de sa cruauté
il égorgerait un jour ses parents. Le bas du feuillet contient
un lapsus calami massivement œdipien ("Maudit, maudit, maudit ! Pour
avoir tué des innocents, tu assassineras ton père et ta
père.") |