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Coupeau grognait, n'ayant même plus l'idée
d'allonger des claques. Il perdait la boule, complètement. Et, vraiment,
il n'y avait pas à le traiter de père sans moralité, car la boisson lui
ôtait toute conscience du bien et du mal.
Maintenant, c'était réglé. Il ne dessoulait pas de six mois, puis il
tombait et entrait à Sainte-Anne ; une partie de campagne pour lui.
Les Lorilleux disaient que M. le duc de Tord-Boyaux se rendait dans ses
propriétés. Au bout de quelques semaines, il sortait de l'asile,
réparé, recloué, et recommençait à se démolir, jusqu'au jour où, de
nouveau sur le flanc, il avait encore besoin d'un raccommodage. En trois
ans, il entra ainsi sept fois à Sainte-Anne. Le quartier racontait qu'on
lui gardait sa cellule. Mais le vilain de l'histoire était que cet
entêté soûlard se cassait davantage chaque fois, si bien que, de
rechute en rechute, on pouvait prévoir la cabriole finale, le dernier
craquement de ce tonneau malade dont les cercles pétaient les uns après
les autres.
Émile Zola, L'Assommoir,
chapitre XI.
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