Encyclopédie des arts du cirque

Arts du cirque

Les Animaux de Chantecler : Le chat (Chabat), la pintade (Augustine Leriche), la poule faisane (Simone), le coq superbe (Lucien Guitry), etc.

Chantecler, pièce d’Edmond Rostand
Affiche d’après un dessin de Daniel de Losques, 1910
Lithographie en couleur, 40 x 120 cm
BnF, département des Estampes et de la photographie, ENT DN-1 (LOSQUES,Danielde)-FT6
© Bibliothèque nationale de France
Avec ses 70 personnages, ses 195 costumes, la pièce d’Edmond Rostand créée en 1910 au théâtre de la Porte-Saint-Martin est un véritable défi en termes de mise en scène. Surtout, l’incarnation des personnages, animaux de la basse-cour et de la forêt, passe pour l’auteur par une véritable transformation physique, soutenue par un vestiaire réaliste et chamarré. Le soir de la première représentation, le public découvre une véritable volière avec des oiseaux familiers et d’autres qui le sont moins, des créatures nocturnes, une taupe, des lapins, un rat, un chat et un chien ! L’histoire est celle d’une sourde conspiration ourdie contre le coq qui se vante chaque jour de faire lever le soleil grâce à son chant… Le grand duc, les hiboux, hulottes et autres chats-huants, tous oiseaux de nuit, lui en veulent évidemment beaucoup de raccourcir leur période de chasse et ils échafaudent un plan qui doit le mener à sa perte.
Une histoire d’amour entre le coq et une jolie poule faisane égarée dans la cour de la ferme, un duel sanglant avec un coq de combat et un geste final héroïque structurent une pièce « monstre » construite comme une joyeuse parabole sur le courage, mais que bien peu de théâtres se risquent à monter en raison de sa complexité.
Cette lithographie très colorée montre bien le raffinement des costumes et le détail de leur conception pour caractériser à la fois l’animal représenté et le caractère incarné par le comédien qui le porte. Du sot au vaniteux, du fourbe à la coquette, la typologie de ces aimables bêtes de basse-cour flirte singulièrement avec les petits travers d’une Humanité aux multiples facettes, toujours prompte à prendre parti pour l’une ou l’autre des pires suggestions qu’on lui offre… Le créateur des costumes, Alfredo Edel, a réussi à synthétiser dans des silhouettes très fortes des « personnalités » animales soutenues par la virtuosité des comédiens. Empreintes d’une forme de réalisme poétique, ses créatures de chiffon accèdent avec force à cette fragile ligne de démarcation entre le jeu et la justesse.
Cette logique d’anthropomorphisation est récurrente au cirque où les acrobates travestis en animaux, de façon plus ou moins réaliste, sont nombreux. Des multiples versions du singe Jocko créé par Mazurier à l’Homme-Coq de l’Hippodrome « dressé » par Gugusse, sans oublier les coqs géants animés par des « clowns » Chinois, les exemples ne manquent pas pour créer cet effet de distorsion légère parfois poussé jusqu’à l’osmose : l’ours écuyer du spectacle Battuta mis en scène par Bartabas ne se laisse dévoiler qu’au bout de quelques minutes tant l’illusion de son apparence est parfaite. Une dimension que l’on retrouve sur la piste du Circo Price de Madrid avec des ours polaires plus vrais que nature… mais qui sont rendu bien « vivants » par les prodiges de la robotique : une ultime variation sur la virtuosité humaine…
 
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