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Quand le saint homme et les trois frères
furent montés dans la nef, on déploya la voile. Le vent l'emplit
et les emporta si rapidement qu'ils ne virent bientôt plus que le
ciel et la mer. Pendant trente jours il souffla, et ils n'avaient nul besoin
de ramer, mais ils manœuvraient seulement les cordages pour tenir
la voile toujours gonflée. Au trente et unième jour, le vent
tomba. Ils se remirent aux rames et nagèrent tant qu'ils pleuraient
de fatigue sur leurs bancs. Saint Brandan, voyant cela, les réconforta,
disant : « Beaux frères, n'ayez pas peur, car Dieu est
notre nautonier et notre pilote. Confions-nous à lui. Rentrez les
avirons et le gouvernail. Laissez seulement la voile étendue, et
que Dieu fasse ce qu'il voudra de ses serviteurs et de sa nef. »
Alors ils se laissèrent porter sur les vagues monstrueuses, regardant
de tous côtés l'horizon où n'apparaissait point d'île,
mais seulement la procession des nuages qui défilaient sans fin.
Parfois, à la vêprée, le vent soufflait. Ils ne savaient
d'où il venait, ni vers quelles régions il entraînait
leur nef. Au bout de trois mois, une terre apparut. |