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Pièce
en sept tableaux. Création à Paris, théâtre
Antoine (direction Simone Berriau), le 2 avril 1948. Mise en
scène Pierre Valde, supervisée par Jean Cocteau.
Maquettes d'Olga Choumansky, décors réalisés
par Émile et Jean Bertin. Avec André Luguet (Hoederer),
François Périer (Hugo), Paula Dehelly (Olga),
Marie-Olivier (Jessica), Jean Violette (Louis), Jacques Castelot
(le prince), Robert Bailly (Slick), Maurice Régamey (Georges),
Robert Le Béal (Karsky), Maïk (Frantz), Christian
Marquand (Charles).
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"J'ai préféré
avoir dans ma pièce des comédiens du boulevard
pour qu'elle soit jouée le plus simplement possible."
(Arts, 26 mars 1948.)
En écho, François Périer précise :
"Il m'a offert une chance irremplaçable avec Les Mains
sales. En me donnant un rôle magnifique, bien sûr,
mais aussi en ne critiquant pas le théâtre de boulevard,
où j'avais connu la renommée [.]. Devant Sartre,
j'avais pourtant tendance à battre ma coulpe, à
m'excuser de jouer autant de broutilles et de comédies
légères. Il balayait toujours l'argument : "Faites
votre métier, faites "tout votre métier",
croyez-moi." " (François Périer, Profession
menteur.)
De son côté, la décoratrice de la pièce,
Olga Choumansky, commente l'impression ambiguë créée
par le mélange des genres que provoquent les choix de
la distribution : "Les répétitions ont commencé.
Habituée à travailler avec Valde, je sentais en
lui une grande angoisse. Ce milieu de comédiens tels
qu'André Luguet, François Périer, Castelot,
changeait son habitude de travailler dans l'atmosphère
de camaraderie confiante et simple. J'ai senti que la vedette
de cette pièce était le "texte", ce
texte merveilleux de Sartre. La mise en scène, le décor,
devaient s'effacer devant ce texte. Madame Berriau, femme charmante,
était naturellement très soucieuse de la bonne
marche de son théâtre. Elle escomptait un grand
succès, aussi, voyant Pierre Valde réservé,
a-t-elle imaginé de demander à Jean Cocteau de
collaborer avec lui à la mise en scène. Je connaissais
bien Valde et son caractère, et j'ai vu Jean Cocteau
au travail également ; j'ai senti arriver un vrai
désastre. Sartre s'est montré humain, loyal et
très juste ; il entretenait l'équilibre avec
autorité et tact."
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Sartre a tenté de s'expliquer
sur ses sources d'inspiration, les "difficultés que des
élèves à moi, bourgeois de bonne volonté,
avaient avec le parti communiste. J'ai pensé aussi à
l'assassinat de Trotsky", thèse que confirme Simone de
Beauvoir dans La Force des choses. La pièce, qui
devait s'intituler "Les biens de ce monde", est un succès
public : de grands acteurs, une pièce perçue
comme anticommuniste - et qui fait bientôt l'objet d'une
offensive des communistes. Comme bien des fois déjà,
l'interprétation de ce théâtre est fondée
sur des malentendus, sur lesquels Sartre s'expliquera, mais
souvent bien des années plus tard. En novembre 1948,
Sartre intente un procès à l'éditeur Nagel
à propos de l'adaptation des Mains sales à
New York.
En décembre, les Soviétiques demandent aux autorités
finlandaises d'interdire la pièce, qu'ils considèrent
comme une œuvre de "propagande hostile à l'URSS". En
novembre 1952, c'est Sartre qui fait interdire la pièce
à Vienne.
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