De Conceptu et generatione hominis… de Jakob Ruf : frontispice

Chez Sigmund Feyerabend (Francfort-sur-le-Main), 1580

In-4°, avec pièces liminaires, 101 p.
BnF, Réserve des livres rares, 4-TB68-20
© Bibliothèque nationale de France
Dans l’édition originale de 1857 comme dans celle de 1861, la mort vient conclure le parcours des Fleurs du Mal : elle est le point de fuite. Fascinante, elle apparaît à Baudelaire, à qui la tentation du suicide est familière, comme une promesse d’arrachement à l’ennui, dissolution et solution à la fois : « Ô Mort, vieux capitaine, il est temps ! levons l’ancre ! / Ce pays nous ennuie, ô Mort ! Appareillons ! » disent les vers du Voyage, le poème sur lequel s’achève la seconde édition des Fleurs du Mal. L’image de la Mort est non seulement présente en de nombreux poèmes, mais si capitale que Baudelaire a voulu, à l’occasion de la seconde édition, qu’elle forme le frontispice de son recueil, bien qu’aucun des projets de gravure ne soit alors parvenu à le satisfaire.
 
Pour transformer en squelette l’arbre de la Connaissance, Jost Ammann s’inspire des frères Barthel (c. 1502-1540) et d’Hans Sebald Beham (1500-1550). Le frontispice qu’il réalise pour le livre de Jakob Ruf est ensuite reproduit par Eustache-Hyacinthe Langlois dans son Essai historique, philosophique et pittoresque sur les Danses des morts (Rouen, Lebrument, 1851, t. II, pl. VII). C’est la lecture de ce livre qui inspire à Baudelaire, au printemps 1859, un projet de frontispice pour la seconde édition des Fleurs du Mal : « Un squelette arborescent, les jambes et les côtes formant le tronc, les bras étendus en croix s’épanouissant en feuilles et bourgeons, et protégeant plusieurs rangées de plantes vénéneuses, dans de petits pots échelonnés comme dans une serre de jardinier » (lettre à Nadar, 16 mai 1859).