Le désespéré

« Qui parmi nous n’est pas un homo duplex ? », demande Baudelaire en rendant compte du recueil de nouvelles La Double Vie de son ami Charles Asselineau. « Je veux parler, poursuit-il, de ceux dont l’esprit a été dès l’enfance touched with pensiveness ; toujours double, action et intention, rêve et réalité ; toujours l’un nuisant à l’autre, l’un usurpant la part de l’autre. » C’est là, au détour d’un écrit critique, l’expérience de sa propre mélancolie qu’il décrit : maladie de la vie séparée, division de l’être en proie au remords, douleur d’une impossible coïncidence avec soi-même, dissonance d’un cœur écartelé entre « deux sentiments contradictoires, l’horreur de la vie et l’extase de la vie ».