Cadre et hypercadre
  


" Le cadre est une fenêtre intérieure […]. L’image ainsi délimitée ouvre donc sur un univers dont le sens est en nous " (Pierre Masson, Lire la bande dessinée).
Bulle du texte, cadre de la vignette, hypercadre de la planche : une planche de BD est comme une poupée russe constituée d’un emboîtement de cadres. Chacun d’eux instaure une frontière que le héros poétique tente de fissurer. Sans compter l’inspiration des dessinateurs dont les styles variés, souvent picturaux, font la part belle aux tableaux de toutes formes et de toutes dimensions. Ainsi, avec une minutie rappelant celle des enlumineurs et des maîtres verriers, l’américain Winsor McCay imagine pour Little Nemo des contes dessinés où les architectures de métropoles féeriques imposent leurs formes aux cadres de ses planches. Fred recherche, lui, une interaction entre la narration et les instruments du narrateur et multiplie les acrobaties verbales et graphiques. Avec l’intrusion de la poésie dans la BD, c’est l’organisation de la planche qui semble dicter le récit, ce que Benoît Peeters appelle " l’utilisation productrice de la planche ".
  

  

Entre chacun de ces cadres : un blanc. En théorie, chacun a une fonction : un blanc entre chaque vignette d’un strip se nomme ellipse, inter-cadre ou espace inter-iconique ; un blanc entre deux strips, l’entre-strip ; puis vient la marge de gauche et celle de droite, qui peuvent être considérées comme des entre-planches. En tout cas, en pratique, tous ces blancs peuvent influencer le contenu et la perception de la planche selon : leur largeur, les textes et images qu’ils contiennent, leur couleur, leur ouverture sur les cases. C’est ainsi que chaque planche génère ses propres règles de lecture.