Ludwig van Beethoven (1770-1827)

  Beethoven est un Titan, un Archange, un Trône, une Domination. Vu du haut de son œuvre, tout le reste du monde musical semble lilliputien. Il a pu, il a même dû paraphraser l'apostrophe de l'Évangile, et dire : "Hommes, qu'y a-t-il de commun entre vous et moi ?"

Les Grotesques de la musique
  

Berlioz découvre Beethoven lors de soirées de la Société des concerts du Conservatoire, dirigées par le chef d'orchestre Habeneck, au printemps 1828.


Je venais d'apercevoir en deux apparitions Shakespeare et Weber ; aussitôt, à un autre point de l'horizon, je vis se lever l'immense Beethoven. La secousse que j'en reçus fut presque comparable à celle que m'avait donnée Shakespeare. Il m'ouvrait un monde nouveau en musique, comme le poète m'avait dévoilé un nouvel univers en poésie (Mémoires, ch. XX)
La découverte de Beethoven est une révélation qui le guidera et dont il parlera tout au long de sa vie. Berlioz n'est pas le seul à vénérer le grand compositeur allemand, tous les musiciens romantiques le choisissent comme figure tutélaire. Ils admirent son œuvre autant que sa personnalité rebelle : Beethoven est l'artiste qui crée pour lui-même, indépendant de toutes commandes. Il s'adresse à tous, s'inspirant de la nature et de ses jaillissements, de ses orages ou de ses douceurs, et puisant dans la littérature et la poésie de son temps les sujets de ses œuvres.

Berlioz admire sa musique car elle traduit la profondeur des sentiments, l'humanité. Mais Beethoven est surtout le compositeur qui donne à la symphonie sa grandeur monumentale. Il est celui qui a su adapter la structure classique à la fougue de son tempérament, frayant la voie à ce que les romantiques appelleront la "musique à programme". À sa suite, Berlioz composera la Symphonie fantastique, une musique inspirée par la poésie, le théâtre, le mythe, sa propre vie et précédée d'un "programme", un texte annonçant et décrivant les diverses parties de l'œuvre.
Le compositeur français admire aussi chez Beethoven le côté novateur de son écriture musicale : ainsi, par exemple, le remplacement de la forme du menuet par celle du scherzo à partir de la Deuxième Symphonie, ou encore l'introduction d'une ode, "An die Freude", de Schiller, chantée par quatre voix solistes et un chœur mixte dans la Neuvième Symphonie.

À son tour, Berlioz modifiera et amplifiera la forme de la symphonie en empruntant à d'autres genres (opéra, symphonie et cantate).


> La Symphonie pastorale de Beethoven