Encyclopédie des arts du cirque

Arts du cirque

Moung-Toon, jeune jongleur birman

Vers 1880
Photographie colorisée
BnF, département des Arts du spectacle, 4-COL-180 (153)
© Bibliothèque nationale de France
Durant tout le XIXe siècle, des showmen s’ingénient à nourrir l’appétit du public pour les spectacles de curiosités. Ils importent et exhibent des groupes ethniques de contrées qui excitent l’imagination. Ils détournent ainsi de leur contexte et théâtralisent certaines pratiques apparentées au jonglage comme le jet du boomerang par les Bushmen d’Australie, des chasseurs qualifiés de cannibales pour pimenter leur présentation dans les foires expositions et les side-show des cirques géants [Poignant 2004].
Plus sophistiquée, la technique du chinlon apparaît aux yeux du public européen comme une déclinaison curieuse du jonglage de balles, pratiquée sans les mains. Le chinlon est un jeu créé à l’origine pour célébrer les princes birmans lors de compétitions où l’enjeu était d’attraper au sol, de lancer et d’envoyer rapidement des balles sur une partie de son propre corps comme l’épaule, le front ou la nuque et les stabiliser sans les laisser tomber. Moung-Toon était vraisemblablement issu de ces groupes d’enfants qui s’entraînent au chinlon dans la rue à l’aide de balles de fortune, en s’efforçant de ne pas sortir d’un cercle tracé au sol. Sa virtuosité devait étonner déjà et a dû attirer l’attention d’un directeur de troupe en Birmanie, puis d’un impresario. Expatrié, il se retrouve exposé, presque nu pour recréer un petit air de jungle, manipulant du bout du pied balles en bambou tressé et balles en verre coloré sous les projecteurs d’une piste de cirque où il émeut et séduit les spectateurs.
 
Source : Roslyn Poignant, Professional Savages, Yale University, 2004.