Encyclopédie des arts du cirque

Arts du cirque

Le masque de Kalle Bronett

Photographie par Hedda Walther, vers 1930
BnF, département des Arts du spectacle, 4-COL-180 (146)
© Bibliothèque nationale de France
Découverte par l’écrivain et peintre animalier allemand Paul Eiper – ou Eipper 1871-1964 –, la photographe Hedda Walther réalise pour lui des reportages dans des parcs zoologiques et certains cirques.
Parmi les amis de Paul Eiper figure l’artiste suédois Carl Goldkette-Bronett (1889-1937), dit Kalle, auguste des 4 Frères Bronett. Invité à vivre dans une roulotte pour les vingt jours de la tournée Hagenbeck en Suède en 1929, Paul Eiper observe particulièrement le quotidien de Kalle et sa métamorphose de monsieur-tout-le-monde en auguste, qu’il s’attache à décrire avec un soin mêlé d’une forme de ravissement inquiet. La réalisation du « masque » en est une étape essentielle qui obéit à une forme de rituel bien rôdé : « Devant un carré de miroir sans cadre, Kalle Bronett se maquille. (…) il se frotte le visage d’un onguent couleur chair, il masse et pétrit ses traits et me devient soudain curieusement étranger. Ses lèvres disparaissent, sa bouche n’est plus qu’une raie étroite. Avec un fard rouge foncé, il trace sur chacune de ses joues deux arcs de cercle partant des narines pour se prolonger jusque sous le menton, une ligne verticale au-dessus du nez, deux lignes sinueuses qui relient le coin des yeux aux tempes et vont se rejoindre sur le front. Grâce au blanc laiteux sorti d’un troisième tube, les orbites, les cils et les sourcils du clown se fondent en une surface unie inexpressive. Au milieu de ce vide étincellent seulement deux trous noirs, les prunelles. Puis Kalle fait charbonner une allumette. De sa main droite, il borde de noir les deux arcs rouges, dessine un pli soucieux sur son front et marque les rides du cou. Un nuage de blanc de Meudon couvre tout le visage. (…) Kalle s’ajuste un bout de nez en forme de boule puis une perruque rouge feu. D’un balai minuscule il chasse la poudre en excès. Il s’examine dans le miroir, et tout en tressant amoureusement les mèches de ses cheveux, s’amuse à se faire des grimaces – grimaces joyeuses, désespérées, ricanantes ou diaboliques. »
 
Source :
- Paul Eiper, Un cirque en voyage, Zirkus, édition française, Paris, Boivin & Cie, 1941, p. 110-116. [Édition originale, Auf Wanderfahrt mit Tier und Mensch, 1937.]