Interroger l'objet | Où finit l'objet et où commence le fond ? (1/1)
Maurice Tabard, Gant et flacon sous les toits de Paris
Eugène Atget, Porte d'Italie. Zoniers. 1913
Alfred Saint-Ange Briquet, Alexis Godillot. Équipement pour la cavalerie

François Tuefferd, Pèr'Lustucru
Robert Doisneau, Le sculpteur
Laure Albin-Guillot, Publicité pour Salantale

Paul Schulz, Steeple chase
Henri Le Secq, Pichet et assiette, n°27.
Florence Henri, Isle d'Ouat. Bretagne
Où finit l'objet et où commence le fond ?
La photographie d'Alfred Saint-Ange Briquet détaille l'équipement pour la cavalerie. Chaque pièce se détache sur un plan neutre et l'ensemble adopte l'aspect d'une planche scientifique. En regard de cette lisibilité, Le sculpteur de Robert Doisneau introduit le trouble d'abord par son titre puisque la photographie est celle d'un intérieur. Puis la juxtaposition d'objets et d'images crée des plans qui se mêlent et se répondent sans cesse. Les baguettes sur les murs tracent de nouveaux cadres et il devient ainsi difficile de dissocier fond et objet.
La photographie de Maurice Tabard ou celle de Laure Albin-Guillot présentent des objets au premier plan (gant ou tube) et à l'arrière-plan (cheminées ou tubes). Inscrites dans le cadre de la fenêtre les cheminées contrebalancent la présence des objets au premier plan, tandis que les tubes se répètent à l'infini en donnant le sentiment que ceux de devant succédaient à d'autres.
La Porte d'Italie photographiée par Eugène Atget se compose d'un amoncellement de récipients hétéroclites et de cabanes. Sans fenêtre ni habitant, ces constructions qui ressemblent à des boîtes résultent de la juxtaposition de planches. Est-ce leur rapport à l'humain qui les empêche d'être de simples objets ? Le fond sur lequel se détachent les objets ne serait-il pas en fait le plan neutre du ciel ?
Distinguer les objets du fond est également difficile dans la nature morte d'Henri Le Secq ou la publicité pour le Pèr'Lustucru de François Tuefferd. La superposition des plans et la transparence dématérialise ce qui ailleurs tient son relief du jeu de l'ombre et de la lumière. Qu'y a-t-il à regarder, le dessus ou le dessous, le fond ou la forme, l'homme présent ou évoqué ou l'objet qui parle de lui ? Dans Isle d'Ouat, Bretagne, Florence Henri situe le siège au premier plan et l'homme à mi-chemin de la ligne d'horizon tracée par l'océan. Quel est alors le "sujet" dans cette apparente inversion hiérarchique ? En mettant en scène Steeple chase, Paul Schulz replace pour sa part tout dans l'ordre attendu : un cavalier sur un cheval, le cheval au-dessus de l'obstacle, fussent-ils tous des objets se détachant sur un fond contrasté, afin de recréer l'illusion d'un espace réel.