Les Elemens de la geometrie d’Euclides Megarien
Traduits et restituez à leur ancienne breveté… Seconde edition. Reveuë et augmentée par l’autheur
Euclide. Paris, Jacques le Roy, 1613.
245 x 170 x 22 mm (ouvert : 29 cm)
Bibliothèque nationale de France, Réserve des livres rares, RÉS-V-6040
© Bibliothèque nationale de France
Gilberte Périer a relaté, dans la Vie de son frère, le parti qu’avait pris Étienne Pascal de s’occuper personnellement de l’instruction de son fils, en suivant un programme pédagogique soigneusement concerté. Bien qu’il fût un mathématicien de premier ordre, il en avait proscrit l’enseignement précoce des mathématiques mais fut prévenu par l’impatience de son fils : faute de l’apprendre d’autrui, Blaise « fut contraint, écrit Gilberte Périer dans le passage le plus célèbre de son récit biographique, de se faire lui-même des définitions, et appelait un cercle un rond, une ligne une barre, et ainsi des autres. Après ces définitions, il se fit des axiomes, et enfin il fit des démonstrations parfaites ; et comme on va de l’un à l’autre dans ces choses-là, il poussa ses recherches si avant qu’il en vint jusques à la trente-deuxième proposition du premier livre d’Euclide ». Ainsi Pascal apparaît déjà, à douze ans, en pleine possession de cet « esprit géométrique » dont il fera vingt ans plus tard la théorie, écrivant que « l’art de persuader […] consiste en trois parties essentielles : à définir les termes dont on doit se servir par des définitions claires ; à proposer des principes ou axiomes évidents pour prouver la chose dont il s’agit ; et à substituer toujours mentalement dans la démonstration les définitions à la place des définis » – à moins que Gilberte Périer, en rédigeant son récit, n’ait projeté cet exposé de l’âge mûr sur une anecdote de l’enfance. Quoi qu’il en soit, effrayé par le génie de son fils, Étienne Pascal s’en ouvrit à son ami Le Pailleur. C’est sur les conseils de celui-ci que, poursuit Gilberte Périer, « mon père lui donna les Éléments d’Euclide pour les lire à ses heures de récréation. Il les vit et les entendit tout seul, sans avoir jamais eu besoin d’aucune explication ». On ignore quelle édition d’Euclide fut donnée par Étienne Pascal à son fils, mais il s’agissait probablement d’une traduction française puisque, en vertu de ses principes pédagogiques, « il ne voulut point commencer à lui apprendre le latin qu’il n’eût douze ans, afin qu’il le fît avec plus de facilité ». Ainsi Pascal a peut-être reçu de son père la traduction française de Didier Dounot (1574- 1640) : parue d’abord en 1609 et rééditée en 1613, elle était la première traduction française intégrale des Éléments, œuvre d’un correspondant de Mersenne. Elle est précédée d’une intéressante épître au lecteur où Dounot insiste sur l’importance de la brièveté dans le style géométrique, essentielle pour ne pas « étourdir la vivacité d’esprit de ceux qui apprennent » : propos que le Pascal de la maturité n’aurait pas désapprouvé.
 
 

> partager
 
 

 
 

 
> copier l'aperçu