Les partitions me firent perdre le sommeil, oublier le boire et le manger ; j'en délirais. Et le jour où, après une anxieuse attente, il me fut enfin permis d'entendre Iphigénie en Tauride, je jurai, en sortant de l'Opéra, que, malgré père, mère, oncles, tantes, grands-parents et amis, je serai musicien. |
|
Mémoires, chap. V
|
|
Lorsqu'il arrive à Paris pour suivre des études
de médecine, Berlioz découvre les partitions de Gluck à
la bibliothèque du Conservatoire qu'il recopie pour s'en imprégner.
En cette année 1821, Berlioz vit avec passion la musique de son maître.
Aux concerts, il suit partitions en main Iphigénie en Aulide (1774)
et Iphigénie en Tauride (1779). Gluck est la révélation
première, celle qui confirme la vocation de Berlioz pour la musique.
Ainsi, d'Orphée, Berlioz exalte "les harmonies vaporeuses,
ces mélodies mélancoliques comme le bonheur, cette instrumentation
douce et faible donnant si bien l'idée de la paix infinie !
Tout cela caresse et fascine. On se prend à détester les sensations
grossières de la vie, à désirer de mourir pour entendre
éternellement ce divin murmure." (À travers chants)
Gluck avait refusé le modèle italien, alors très
en vogue, et avait trouvé une nouvelle inspiration dans la tragédie
grecque : la musique s'accordait mieux, selon lui, avec la situation
dramatique et le chœur participait davantage à l'action. Gluck
défendait aussi l'idée d'une ouverture, qui "[préviendrait]
les spectateurs sur le caractère de l'action [...] et leur [indiquerait]
le sujet" (épître dédicatoire d'Alceste à
l'archiduc Léopold). Refusant les vocalises, il tenta également
d'imposer une certaine discipline aux chanteurs. Enfin, soucieux de simplicité
et d'unité, il réduisit l'action de cinq à trois
actes et diminua la part du ballet, désormais incorporée
au drame. > Alceste de Glück |