[Madame de Sévigné en parle dans une lettre de 1680... Il apprend ses sermons par coeur et les récite les yeux fermés. Élocution neutre...]
JE ne prétends rien exagérer, Chrétiens, et ce n'est pas mon dessein de condamner sans exception tous les divertissements de la vie. Je sais quels arrêts le Fils de Dieu a portés contre les heureux du siècle , lorsqu'il a dit en général : (a)
Vice vobis qui ridetis ; malheur à vous qui cherchez les plaisirs de ce monde: (b)
Voe vobis quia babetis consolationem vestram ; malheur à vous qui trouvez votre
félicité fur la terre , et qui la faites consister dans les vaines joies de la terre. Mais du reste sans altérer en aucune forte les paroles de Jésus-Christ, et sans vouloir en adoucir la sévérité , je puis , et je dois même convenir d'abord qu'il y a des récréations innocentes , des récréations honnêtes , et par conséquent permises selon les régies de discrétion & de modération que l'Evangile nous prescrit. Je ne viens donc point vous dire que tous les divertissements du monde font criminels et réprouvés de Dieu : mais aussi j'avance avec saint Grégoire Pape, qui l'a remarqué avant moi, que ces divertissements du monde permis et innocents sont bien rares ; que ces divertissements honnêtes sont dans le monde en bien petit nombre; en un mot, que la plupart des divertissements du monde font condamnables , pourquoi ? par trois rairons. Je les considère ces divertissements mondains, dans leur nature, dans leur étendue , et dans leurs effets. Or , je soutiens qu'ils sont presque tous, ou impurs et défendus dans leur nature ou excessifs dans leur étendue ou enfin scandaleux dans leurs effets.
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Une chose est agréable, ou le paraît ; et parce qu'elle est agréable, on l'aime ; et parce qu'on l'aime , on se figure qu'elle est bonne ; et à force de se le figurer , on s'en fait une espèce de conviction , en vertu de laquelle on agit au préjudice de la conscience et malgré les plus pures lumières de la grâce. Or , appliquons cette maxime générale aux points particuliers, fur tout à celui que je traite. Je prétends qu'il y a des divertissements dans le monde qui passent pour légitimes, et que l'opinion commune des gens du siècle autorise ; mais que le Christianisme condamne, et qui ne peuvent s'accorder avec l'intégrité & la pureté des moeurs.
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Ainsi, par exemple , ces représentations profanes, ces spectacles où assistent tant de mondains oisifs et voluptueux, ces assemblées publiques et de pur plaisir, où sont reçus tous ceux qu'y amène , soit l'envie de paraître , soit l'envie de voir ; en deux mots , pour me faire toujours mieux entendre ,
comédies et bals , sont-ce des divertissements permis ou défendus ? Les uns éclairés de la véritable
sagesse, qui est la sagesse de l'Evangile , les réprouvent ; les autres trompés par les fausses lumières d'une prudence charnelle les justifient , ou s'efforcent de les justifier. ............................................................................................................................
Mais vous le savez : Prédicateurs dans la Chaire, Directeurs dans le Tribunal de la Pénitence , Docteurs dans les Ecoles, Pasteurs des âmes , Ministres des Autels , tiennent tous encore le même langage , et se trouvent appuyés de tout ce que l'Église a de vrais enfants & de vrais fidèles. Que reste-t-il donc ? je l'ai dit, quelques mondains , c'est-à-dire , un certain nombre de gens libertins , amateurs d'eux-mêmes , et idolâtres de leurs plaisirs ; de gens sans étude , fans connaissance , sans attention à leur salut ; de femmes vaines , dont toute la science se réduit à une parure, dont tout le désir est de paraître & de se faire remarquer , dont tout le soin est de charmer le temps et de se tenir en garde contre l'ennui qui les surprend, dès que l'amusement leur manque
, et qu'elles sont hors de la bagatelle...
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Mais souffrez que je me borne à ceci, sur quoi je ne me suis encore jamais bien expliqué : c'est le jeu. Principe de mille malheurs, et passion que je ne puis trop fortement combattre, puisqu'elle est la source de tant de désordres. Vous le savez : on joue , mais sans retenue ; et l'excès est tel , que ceux mêmes qui en sont coupables, sont obligés de le condamner. Que j'en prenne à témoin un joueur de profession , et que devant Dieu je le prie de me répondre si son jeu ne va pas trop loin , je dis trop loin selon la raison , le Christianisme & la conscience, il en conviendra. En effet, dans la plupart. des jeux, surtout des jeux que l'usage du monde autorise le plus, il y a trois fortes d'excès opposés à la raison et à la Religion. Excès dans le soin qu'on y emploie , excès dans la dépense qu'on y fait ,.excès dans l'attachement & l'ardeur avec laquelle on s'y porte : tout cela contraire aux règles de la vraie piété & aux maximes éternelles de la Loi de Dieu.