Ce n'est pas à proprement parler un coup de foudre
mais plutôt l'impression ressentie par l'un et par l'autre
d'avoir trouvé son double. Très vite s'installe
une relation unique : aux premières déclarations
d'amour se mêlent déjà d'interminables
discussions littéraires et philosophiques. Ils se sentent
tout à la fois égaux et libres, ils éprouvent
le même souci de transparence. Beauvoir confie dans
La Force de l'âge : "Selon lui, l'écrivain,
le conteur d'histoires, devait ressembler au "Baladin" de
Synge ; il ne s'arrête définitivement nulle
part. Ni auprès de personne. Sartre n'avait pas la
vocation de la monogamie. Entre nous, m'expliquait-il en utilisant
un vocabulaire qui lui était cher, il s'agit d'un amour
nécessaire : il convient que nous connaissions
aussi des amours contingentes [...]. D'une manière
plus générale, je savais qu'aucun malheur ne
viendrait jamais par lui, à moins qu'il ne mourût
avant moi. Nous conclûmes un autre pacte : non
seulement aucun des deux ne mentirait à l'autre, mais
il ne lui dissimulerait rien".
Les lettres et les carnets publiés de l'un et de l'autre
depuis leur disparition témoignent qu'ils s'attachèrent
à ne pas trahir les promesses de leurs vingt ans. Mais
ce jeu de la transparence devait, une fois révélé,
en bouleverser plus d'un parmi leurs fidèles.
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