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De la première version
à l'origine une simple préface aux Œuvres
complètes de Jean Genet , six fragments sont
publiés de juillet à novembre 1950 dans Les
Temps modernes ; ils seront remaniés et augmentés
deux ans après pour devenir une grande biographie, Saint-Genet
comédien et martyr, publiée par Gallimard
en 1952. Commencé pendant la guerre froide, un an environ
après que Sartre a abandonné la Morale,
entre Baudelaire et Flaubert, entre L'Être
et le Néant et la Critique
de la raison dialectique, Saint Genet, biographie
psychanalytique, est une charnière dans l'œuvre de Sartre
"qui peut passer comme intermédiaire entre la philosophie
et la littérature" (La Cérémonie des
adieux, p. 350). À la fin du volume, Sartre insère
une "Prière pour le bon usage de Genet" qui est un manifeste
d'intention : "Montrer les limites de l'interprétation
psychanalytique et de l'explication marxiste et que seule la
liberté peut rendre compte d'une personne dans sa totalité,
faire voir cette liberté aux prises avec le destin, d'abord
écrasée par ses fatalités puis se retournant
sur elles pour les digérer peu à peu, prouver
que le génie n'est pas un don mais l'issue qu'on invente
dans les cas désespérés, retrouver le choix
qu'un écrivain fait de lui-même, de sa vie et du
sens de l'univers jusque dans les caractères formels
de son style et de sa composition, jusque dans la structure
de ses images, et dans la particularité de ses goûts,
retracer en détail l'histoire d'une libération
: voilà ce que j'ai voulu."
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Œuvre de première importance,
elle ne fut pas du goût de l'intéressé :
"Quand j'ai eu fini, je lui ai donné le manuscrit, il
l'a lu, et une nuit, il s'est levé, il est allé
jusqu'à une cheminée et il a pensé le jeter
au feu. Je crois même qu'il a jeté des feuilles
et qu'il les a reprises. Ça le dégoûtait
parce qu'il se sentait bien tel que je l'avais décrit
[...]. Il se prenait pour le poète et il me prenait pour
le philosophe." (La Cérémonie des adieux,
p. 350.) |
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