Michael Kenna

A. J. WIERTZ

1855
Une prophétie de 1855
« Il nous est né, depuis peu d'années, une machine, l'honneur de notre époque, qui, chaque jour, étonne notre pensée et effraie nos yeux. Cette machine, avant un siècle, sera le pinceau, la palette, les couleurs, l'adresse, l'habitude, la patience, le coup d'œil, la touche, la pâte, le glacis, la ficelle, le modelé, le fini, le rendu. Avant un siècle, il n'y aura plus de maçons en peinture : il n'y aura plus que des architectes, des peintres dans toute l'acception du mot. Qu'on ne pense pas que le daguerréotype tue l'art. Non, il tue l'œuvre de la patience, il rend hommage à l'œuvre de la pensée. Quand le daguerréotype, cet enfant géant, aura atteint l'âge de maturité ; quand toute sa force, toute sa puissance se seront développées, alors le génie de l'art lui mettra tout à coup la main sur le collet et s'écriera : "A moi ! tu es à moi maintenant ! Nous allons travailler ensemble." »
A. J. Wiertz, Œuvres littéraires, Paris, 1870, p. 309. Cité par Walter Benjamin, [La photographie], Paris, capitale du XIXe siècle. Le Livre des Passages, Paris, Le Cerf, collection Passages, 1989.