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Saint-Germain-des-Prés
Devenu un lieu mythique, Saint-Germain-des-Prés, avec
les cafés de Flore et des Deux Magots, avait l'avantage,
pendant la guerre, de permettre de se réunir et de travailler
dans des salles chauffées. Sartre, qui aimait particulièrement
cette atmosphère, déserta Montparnasse pour ce
quartier, qui fut le point de rencontre des zazous et des existentialistes.
La place a été rebaptisée en l'an 2000
"Place Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir".
Simone
de Beauvoir analyse ce phénomène de mode dans
La Force des choses : Boris
Vian "avait été un des animateurs du
mouvement zazou qu'avaient engendré la guerre et la Collaboration.
Fils et filles de famille, anarchistes, apolitiques, contre
leurs parents pétainistes, ils affichaient une anglophilie
provocante ; ils imitaient l'élégance gourmée,
l'accent, les manières des snobs anglais. L'Amérique,
ils y pensaient si peu qu'ils furent déconcertés
quand Paris se remplit d'Américains ; pourtant ils avaient
avec eux un lien très fort : le jazz, dont ils étaient
fanatiques. L'orchestre où jouait Vian fut engagé
par le "French Welcome Committee" le jour même de l'entrée
des G. I. à Paris. [.] Ainsi s'explique la tenue qui
fut, pendant trois ans, celle des ex-zazous ; ils s'habillaient
avec des surplus américains : blue-jeans et chemises
à carreaux. Ils se réunissaient avenue Rapp, dans
le quartier des Champs-Élysées et aussi au Champo,
au coin de la rue Champollion, qui était alors un dancing.
Une poignée d'entre eux aimaient, outre le jazz, Kafka,
Sartre, les romans américains. Pour lire, pour discuter,
ils venaient à Saint-Germain-des-Prés."
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Un
écrivain engagé
En 1941, revenu des camps de prisonniers où il a découvert
la solidarité, Sartre, abandonnant l'individualisme pacifiste
d'avant-guerre, souhaite agir, donc s'engager. "Il comprit que,
vivant non dans l'absolu mais dans le transitoire, il devait
renoncer à être et décider de faire. Une
fois la paix retrouvée il ferait de la politique...",
témoigne Simone de Beauvoir dans La Force des choses.
Après l'échec de Socialisme et Liberté,
c'est dans le domaine idéologique qu'il s'aventure en
premier lieu, choisissant d'exprimer dans la revue des Temps
modernes sa conception de l'écrivain responsable.
Entre février et juillet 1947, il publie Qu'est-ce
que la littérature ?,
réflexion stimulante sur la littérature et la
politique, manifeste de la littérature engagée.
Dans des propos rapportés par Simone de Beauvoir, il
se dit "osciller entre la prise de position idéologique
et l'action. Mais si je préconise une position idéologique,
aussitôt des gens me poussent à l'action :
Qu'est-ce que la littérature ? me conduit au RDR." |
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Dès l'année suivante, en effet, tout en continuant
de rédiger les Notes pour une morale, il entre
au Rassemblement démocratique révolutionnaire,
parti militant fondé, entre autres, par David Rousset
et Georges Altam. Le RDR, plus un mouvement qu'un parti proprement
dit (il autorisait la double appartenance), aspirait à
un socialisme révolutionnaire et démocratique
qui rejetait à la fois le stalinisme du Parti communiste
français et le réformisme des sociaux-démocrates
de la SFIO : il s'agissait de créer une "troisième
force" à gauche, à la fois plus révolutionnaire
que la SFIO et plus démocratique que le PCF.
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L'Amérique
Passionné dans sa petite enfance par les aventures des
héros de bandes dessinées américaines,
Buffalo Bill, Nick Carter, etc., amateur de westerns puis de
films de Charlie Chaplin, Sartre fut très vite fasciné
par l'Amérique.
Jeune professeur au Havre il choisira comme sujet de causerie
devant le public de la Lyre havraise les romanciers américains
qu'il vient de découvrir, Faulkner, Hemingway, Dos Passos
surtout, "le plus grand écrivain de notre temps", qui
aura une influence déterminante, plus tard, sur Les
Chemins de la liberté. Il devient également
amateur éclairé de jazz au point de l'intégrer
au roman qu'il est en train d'écrire. Les quatre notes
de saxophone de la chanson Some of these days sont aussi
emblématiques de La
Nausée que le marronnier du jardin public. Aussi
fut-il particulièrement heureux de partir en janvier
1945 aux États-Unis pour faire une série de reportages
pour le compte du Figaro et de Combat.
"Vers la fin de novembre, les USA voulurent faire connaître
en France leur effort de guerre et invitèrent une douzaine
de reporters. Jamais je ne vis Sartre aussi joyeux que le jour
où Camus
lui offrit de représenter Combat. [.] D'après
un accord passé entre Camus et Brisson, il devait donner
à celui-ci quelques articles ; il lui envoya des
impressions, des réflexions, des notes écrites
au courant de la plume, réservant à Combat
les papiers qui lui coûtaient du temps et de la peine :
Camus qui avait lu la veille dans le Figaro une description
désinvolte et gaie des villes d'Amérique recevait,
consterné, une étude appliquée sur l'économie
de la Tennessee Valley" (Simone de Beauvoir, La Force des
choses).
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