Nous avons tendance à croire aux données des sens. Nous percevons, croyons-nous, les choses telles qu'elles sont, de manière directe, et comme ingénument. Ainsi pensons-nous percevoir la "nature" directement, intuitivement, sous la forme perceptible du paysage. Paysage et nature ne feraient qu'un, selon le sens commun. Non seulement un terme évoque généralement l'autre mais, plus encore, ils sont communément employés l'un pour l'autre et l'identification paysage/nature nous vient tout "naturellement" à l'esprit.
Nous
savons bien cependant que le paysage est un fait de
culture, et, spécifiquement, de culture artistique, et que la nature, elle, est
principe, et
au principe du devenir et du développement, et qu'elle pourrait s'appeler tout aussi bien "élan vital", par exemple. Mais ce savoir reste en dehors de nos pensées, étranger à nos comportements, isolé dans un compartiment du cerveau.
Pourquoi ce déni, et comment en sommes-nous arrivés à confondre ces deux domaines ? Pour comprendre quel cheminement a pu conduire à cette méprise, et tenter d'y remédier, rien de tel que l'histoire : elle permet de retracer les étapes concrètes d'une construction ingénieuse, ce qui relativise fortement la naturalité du paysage, (
I. Des lieux naturels à la perspective). Il est besoin, cependant, d'une explication plus générale qui concerne l'ensemble de nos comportements,
(II. Des inventions structurantes) et d'une mise en question des concepts de nature et de naturel. (
III. Nature, origine et illusion).