L'héritage
par Guillaume Le Gall


 

Atget et les surréalistes

Aux États-Unis, Atget a considérablement influencé certains photographes tels Berenice Abbott, Walker Evans, Lee Friedlander ou Gary Winogrand. Tous à peu près se réclament de son style documentaire. Walker Evans par exemple déclare en 1931 que “ce qui le distingue est une intelligence lyrique de la rue, qu’il s’est entraîné à observer, un goût particulier pour la patine, un œil qui s’attache au détail, et surtout une poésie qui n’est pas une ‘poésie de la rue’ ou ‘une poésie de Paris’, mais qui émane de l’homme lui-même”. Plus tard, en 1975, il ira jusqu’à déclarer : “Je n’aime pas regarder de trop nombreuses images d’Atget, parce que je suis moi-même trop proche de son style… C’est un léger reste de manque d’assurance, la peur qu’on éprouve face à une puissance et un style si magnifiques.”
De Man Ray ou de son élève et assistante Berenice Abbott, on ne sait pas tout à fait qui des deux a acquis en premier des images d’Atget. Cependant, c’est Berenice Abbott qui œuvra toute sa vie pour faire connaître l’œuvre du photographe. À la mort d’Atget, en août 1927, l’Américaine s’inquiéta du sort réservé aux images d’Atget et déploya toute son énergie pour sauver ce qui restait de la collection. Elle trouva en Julien Lévy, collectionneur d’art, un soutien financier qui lui permit d’acheter la collection. Par la suite, elle prêta ses images pour des expositions et des livres. Enfin, en 1968, elle vendit le tout (photographies, albums, répertoire et certains négatifs) au Museum of Modern Art à New York.
 

Succès posthumes aux États-Unis

Eugène Atget commence la photographie dans la Somme aux alentours de l'année 1888. Dès 1890, il revient à Paris où il s'installe comme photographe professionnel voulant, d'après l'inscription sur sa porte (au 5, rue de la Pitié), produire des “Documents pour artistes”. Une annonce à caractère commercial datée du mois de février 1892 décrit son travail en ces termes : “Paysages, animaux, fleurs, monuments, documents, premiers plans pour artistes, reproductions de tableaux, déplacements. Collection n'étant pas dans le commerce.”
Dès 1897, à une époque où la sauvegarde du vieux Paris devient une cause défendue par un nombre croissant d’historiens et gens de lettres, Atget commence à photographier les quartiers anciens de la capitale. Il entreprend aussi de décrire la vie quotidienne de ces quartiers et, en particulier, de représenter les petits métiers condamnés par le nouveau développement du commerce des grands magasins. Habitué à produire des premiers plans qu'il exécute pour les artistes peintres et dessinateurs, Atget s'attarde à partir de 1901 sur des détails décoratifs de l'architecture ancienne, tels les heurtoirs de portes, des pièces forgées ou encore des éléments sculpturaux qu'il regroupera dans une série intitulée Art dans le vieux Paris.

 
Après quelques succès commerciaux (il commence à vendre aux institutions publiques dès 1898), Atget va développer son travail sur les cours, les escaliers, les églises et les hôtels particuliers, bref, tout ce qui à ses yeux présente un intérêt artistique et historique dans Paris. Le photographe élargit aussi son champ d’investigation aux environs de Paris comme Versailles, Sceaux, Saint-Cloud et la banlieue proche.
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