Des procédures précises
Pour garantir le sérieux des résultats, des procédures
de prises de vues bien précises doivent être respectées :
l’individu est isolé et immobile, tête nue, strictement
de profil et / ou de face, bien éclairé, bien cadré,
sur un fond uniforme neutre. Il faut aussi que toutes les photographies
soient prises de la même manière pour pouvoir ensuite
comparer les indices et établir à partir de ceux-ci les
typologies.
Dans cette optique, Paul Broca, fondateur de l’école d’anthropologie
de Paris, recommande en 1864, dans ses Instructions générales
pour les recherches anthropologiques à faire sur le vivant,
l’usage de la photographie, précisant comment prendre
les clichés : « des têtes nues qui devront
toujours, sans exception, être prises exactement de face, ou
exactement de profil, les autres points de vue ne pouvant être
d’aucune
utilité ». Ces recommandations sont reprises et régulièrement
diffusées par la Société de géographie,
notamment par Armand de Quatrefages. La planche "Hinter-Indien"
de l’Album de Carl Dammann offre un parfait exemple de ces photographies
anthropologiques.
L’objectif de l’exercice étant la comparaison et l’établissement
de "types" humains, la singularité des individus
n’intéresse pas le photographe et peut même constituer
un obstacle : aussi demande-t-on au modèle de gommer toute expression
de son visage. Dans un processus d’objectivation, on cherche à le
ramener à sa spécificité biologique mesurable. C’est
pourquoi les clichés anthropologiques ressemblent aux photographies
d’identité judiciaire d’Alphonse Bertillon et aux
clichés de malades mentaux de Jean Martin Charcot, qui, dans les
années 1880, exploitent la même logique réductrice
pour identifier et caractériser des types de criminels et d’aliénés.